La place de l'Arbre-Monde... Depuis que j'étais arrivée à Mahora, il m'arrivait souvent de venir jusqu'ici pour m’entraîner. La pratique en salle est bien pour travailler ses coups, mais rien ne remplace les exercices en plein air. ne course à pied pour venir jusqu'ici, quelques échauffements et étirements, puis je pratiquais différents mouvements pendant une bonne heure, avant de rentrer Bien sur, pour des raisons d'horaire, je faisais ça très tôt, sans quoi c'était le retard assuré...

Ce matin encore, comme à mon habitude, je me levais très tôt. En prenant bien garde à ne réveiller personne, j'enfilais un shorty et une brassière, avant de passer mon éternelle tenue : T-shirt sans manches et jogging, sans oublier mes protections aux coudes, aux genoux et aux pieds, ainsi que mes mitaines. Une fois équipée, je quitte ma chambre, direction l'Arbre-Monde. On peut s'étonner du fait que je ne prenne pas de chaussures pour une activité extérieure, mais j'ai toujours aimé pratiquer le muay thaï nus-pieds. Question de feeling, je pense...

Bref, une fois sortie du foyer, je commence par faire une série d'inspirations et d'expirations, puis j'étire mes jambes. Le soleil ne s'est pas encore levé, mais sa lumière orangée commence déjà à pointer à l'horizon, baignant les lieux d'une semi-clarté. Une fois prête, je pars en petites foulées à travers le campus. Le bitume est certes rude et froid, mais les protections que je porte m'évitent le plus désagréable. Et puis, ça travaille la plante du pied, et par là même mes points d'appui.

Comme la place de l'Arbre-Monde n'est pas à coté du foyer, j'ai le temps de faire une bonne course à pied, de quoi bien travailler mon souffle. Enfin arrivée, je prends le temps de bien respirer calmement, tout en étirant les différents muscles de mes jambes. Une crampe est si vite arrivée, si on manque de prudence... Dès que ma respiration et mon rythme cardiaque sont revenus à un niveau normal, j'attaque l'échauffement de mon corps tout entier, d'abord par des mouvements simples, puis en enchaînant quelques katas basiques.

Alors que je commençais la récitation de katas plus complexes, faisant appel à une vaste palette de mouvements, j'étais loin de me douter que j'allais bientôt faire face à un opposant d'un tout autre niveau que ceux que j'avais eu jusqu'alors...

Un faible bourdonnement vint tirer la jeune fille de ses songes. Enfin, aussi jeune que puisse se considérer la propriétaire de ces yeux de couleur acier venant de s'ouvrir, ainsi que pourraient le croire les personnes qui la regardent. Non, en dépit de son apparence, l'hybride n'est plus toute jeune, à l'échelle humaine en tout cas. Pensez bien qu'en tout ce temps d'existence, il arriverait à bien du monde de se réveiller dans des lieux incongrus, surtout prenant en compte les jeunes d'aujourd'hui qui parviennent à réaliser des exploits dans le domaine avec seulement une vingtaine d'années. Imaginez donc le résultats que ces mêmes personnes seraient susceptibles de produire en 20 fois plus de temps.

Fort heureusement pour Darcy, ce n'était pas si terrible que ça cette fois-ci. Se réveiller sur une branche de l'arbre monde, cela avait beau être une première pour elle, elle en avait vu d'autres. Ce qui était un triste constat, en revanche, c'est qu'elle avait connu pire... et qu'elle était probablement sobre aussi ces fois là. Se reporter à la résistance de l'hybride à l’alcool pour de plus amples informations.

La brunette se frotta les yeux, réalisant qu'elle s'était assoupie. Voilà qui n'arrivait pas souvent, elle qui voyait habituellement le sommeil venir, qu'elle se fasse surprendre par Morphée de cette façon. L'hybride jeta un regard à la vue qu'offrait son perchoir alors que les premières lueurs du jour faisaient timidement leur entrée. Cela devait faire quoi, trois heures de sommeil à tout casser ? Elle dormait bien plus que cela habituellement... Lorsqu'elle dormait bien sûr.
Le bourdonnement se fit plus intense, rappelant sa présence à la jeune fille. Maintenant qu'elle y prêtait attention, elle reconnaissait très bien ce son : des pensées lointaines. Et à en juger par l'augmentation en intensité, le propriétaire s'en rapprochait.

Darcy "coupa le son" avant d'entendre clairement les pensées de l'individu. Elle était venue s'installer ici pour avoir la paix après tout, non pas pour espionner les états-d'âme des élèves trop matinaux. En revanche, il lui serait impossible de se rendormir dans ces conditions, et ce en raison de l'effort permanent que cela lui demandait de taire les voix des autres personnes qui envahissaient régulièrement son esprit.
Courage Darcy, ce n'est qu'un joggeuse, elle va probablement faire deux ou trois étirements et repartir. Rallonge-toi sur ta branche et ferme les yeux en attendant que ça passe.

… Bon, voilà quelques minutes déjà maintenant que cette fille pratiquait son art martial. Non, l'hybride ne regardait pas, en revanche elle en était arrivée à cette conclusion en écoutant attentivement les respirations de cette personne. Que voulez-vous, lorsque vous essayez de trouver le sommeil, le moindre son peut très rapidement devenir une obsession. Quoi qu'il en soit, elle ne semblait pas prête de partir de si tôt, et l'heure des cours était encore loin... Sachant que Darcy ne voulait non plus miser sur le fait qu'elle soit effectivement une élève, ce dont elle n'a aucune idée pour l'instant.

Elle attendit que la combattante lève les yeux dans sa direction avant de se jeter du haut de l'arbre. L'hybride atterrit avec lourdeur, faisant ainsi tinter les chaînes qui pendaient à sa veste en cuir, sans pour autant se servir de ses mains pour amortir sa chute. Elle retira une brindille de sa longue chevelure noire tout en se redressant, puis reprit, cette fois-ci d'un ton aussi froid que l'acier de ses yeux :

Côté diplomatie, on repassera.

Cela faisait maintenant quelques minutes que j’enchaînais des combinaisons de pieds et de poings, quand j'entendis une voix m’interpeller. À vrai dire, je n'étais pas complètement sure que c'était bien à moi que la personne s'adressait, mais comme il n'y avait personne d'autre dans les environs, je pouvais penser que c'était bien le cas. J'interrompis mon exercice en cours pour rechercher le propriétaire de la voix, ou plutôt la propriétaire. Étrangement, elle semblait venir du haut, comme si la personne était sur un point surélevé. En fait, je ne tarda pas à voir celle qui m'avait interpellée, perchée dans l'une des branches de l'Arbre-Monde.

Se sachant repérée, elle quitta son perchoir, sautant simplement de la branche. En dépit de la hauteur, elle atterrit tout simplement, amortissant à peine le choc avec ses jambes. Pour le coup, voila un excellent moyen de démontrer sa force physique, puisqu'il faut une grande résistance musculaire pour endurer l'onde de choc due à l'impact. Pendant qu'elle se relève, j'en profite pour étudier un peu son apparence.

La fille semble être un peu plus grande que moi, et aussi plus vieille. Sa peau claire est mise en valeur par une surabondance de noir, que ce soit ses cheveux, ses vêtements, ou même ses lèvres. En fait, la seule chose non-noire chez elle sont ses yeux, d'une couleur grise. Quant à ses vêtements... Son haut est caché par un ample manteau, lequel s'est vu rajouter une quantité phénoménale de chaînettes en tout genre. Ses jambes son couvertes par un pantalon tout aussi noir que le reste, dont dépasse une paire de bottes.

Une fois redressée, la fille m'invite, d'une façon assez froide et un peu impolie, à aller m'entraîner ailleurs. Je ne vois pas pourquoi je le ferai. Cela fait déjà un mois que je venais chaque matin ici, je ne vais pas changer mes habitudes juste pour lui faire plaisir. Je lui réponds donc, d'une voix vide de tonalité.

" Je m’entraîne tout les jours ici. "

Ceci étant dit, je reprends mes exercices là où j'avais été interrompue.

Il y avait un mot pour décrire ce genre de réponse : minimaliste. Pour sûr, elle était du genre concise cette fille, peut-être un peu trop d'ailleurs. Alors oui, elle s’entraîne tous les jours ici, et après ? Ça ne faisait pas d'elle la propriétaire des lieux, ou alors la législation japonaise a bien changé au cours de la semaine dernière. Remarquez, on pourrait appliquer le même raisonnement à Darcy, qui ne dispose guère plus du droit d'envoyer balader les gens que cette humaine.

Cependant, voici la logique derrière les pensées de Darcy : l'autre – à défaut de connaître son nom – s’entraîne ici tous les jours, Darcy dort peu souvent. Conséquence de quoi, le sommeil de l'hybride est plus rare et précieux que les exercices de la gamine, raison pour laquelle sa sieste devrait être prioritaire.
Après, il y avait toujours la question de principe et politesse fondamentale qui consistait à ne pas réveiller les gens qui dorment et les laisser tranquilles, mais la semi-démone considérait qu'il serait un peu exagéré de demander à quelqu'un d'arrêter de penser dès lors qu'elle se trouve à moins d'une centaine de mètres d'elle. Cela dit, ça ne l'empêchait pas d'être de mauvais poil à cause de ça, alors fuck logic.

Petite irritation supplémentaire : suite à ce que cette jeune fille semblait considérer comme une "réponse", elle s'était contenté d'ignorer Darcy tout en reprenant ses exercices. L'hybride resta impassible, cependant la sportive venait malgré tout d'érafler son ego.
La dentition parfaite de Darcy fit une brève apparition, avant de se cacher à nouveau derrière ses lèvres noires, tirées dans un sourire en coin. Voilà qu'une nouvelle distraction se présentait à la semi-démone.

La fausse gothique-métalleuse prit un air volontairement hautain et satisfait, histoire de se montrer aussi agaçante que possible. Voyons voir petite sportive, qu'est-ce qui peut bien pouvoir te pousser à bout ? Tu sembles particulièrement apprécier les arts-martiaux, peut-être une piste à creuser...

La semi-démone prononça ces mots tout en marchant en direction de son nouveau divertissement. Arrivée à son niveau, elle se plaça face à elle, passa une mèche de cheveux derrière son oreille et lança d'un air mesquin :

Je me doutais bien que la conversation ne se terminerait pas là, pour autant j'espérais que ce soit le cas. Et j'ai beau réfléchir, je ne vois vraiment pas pourquoi je devais aller m'entraîner ailleurs. D'une part, la place est plus que suffisante pour deux personnes, d'autre part, en étant impolie dans sa requête, il n'y avait aucune chance de me voir obtempérer.
Pourtant, la fille revient à la charge, avec remarques sarcastiques et hautaines. Encore une fois, je suis forcée d'interrompre mon kata à mi-chemin pour pouvoir lui répondre, toujours d'une voix inexpressive.

" Je viens ici depuis un mois. Je ne t'ai jamais rencontrée.
Et je suis à ma place. Celle qui agit comme la maîtresse des lieux est toi. "

Ce qui, dans l'absolu, est vrai. C'est elle qui est venue me voir pour me demander d'aller ailleurs, sans donner de raisons ou explications. Si elle espérait que j'obéisse bien sagement juste parc qu'elle est plus grande ou plus vieille, elle se mettait le doigt dans l’œil, et plutôt deux fois qu'une.
Là dessus, je me vois force de recommencer du début. Ces deux interruptions ont cassé mon rythme. Si cette fille prévoit de m'interrompre une troisième fois, je lui montrerai que tout ce que fait n'est pas seulement fait pour faire joli et en mettre plein les yeux aux passants. Mais surtout fait en vue d'infliger de lourds dégâts.

Le sourire de Darcy s'élargit, laissant de nouveau apparaître ses dents à l'alignement si parfait qu'il en semblait faux. Combien de temps tu comptes te cacher derrière ton pragmatisme, petite ? Combien de balles tu vas te contenter de simplement renvoyer à cette irritante brunette avant de perdre patience ? Quelque chose dit à la brunette en question que ça ne saurait tarder, peu importe à quel point tu sembles feindre l'indifférence.

Un mois donc. Restait à savoir si elle avait eu vent de l'existence de la magie durant cette période de temps. Au vu de la témérité qu'elle affiche, on pourrait en douter. Disons que Darcy est bien placée pour savoir qu'il y a des individus ici capable de briser bien des confiances. Peut-être faudrait-il lui montrer... On verra en fonction de ses réactions.

La semi-démone croisa les bras, regardant de haut sa nouvelle distraction sans sourciller. Allez jeune fille, montre-lui une réaction digne de ce nom, histoire qu'elle sache ce que ces réponses creuses peuvent bien cacher.

Cette fille commençait à m'agacer sérieusement. Ce n'est pas la première fois que je croise des personnes de ce genre. Déjà à mon ancien collège-lycée, certaines parmi les plus âgées se comportaient de la sorte. Enfin, ça ne durait jamais très longtemps, puisqu'il y avait toujours un gang pour leur tomber dessus, et leur rappeler la réalité, quand je ne m'en mêlais pas. Et quand je m'en mêlais, en général ça calmait le jeu définitivement.

Pour en revenir à cette fille, j'avais dit que si elle continuait, je passais à l'offensive. Et bien, c'est ce qu'il va se passer. Je m'approche d'elle, dissimulant mon intention en continuant mon kata, bien que les mouvements n'ont plus rien à voir avec le kata originel. Quand la distance est bonne, je commence à lever le genou droit, comme pour une garde. La suite n'a rien à voir avec de la défense.

Ma jambe gauche, mon point d'appui, est face à la fille. Brusquement, je la fais pivoter d'un quart de tour vers la gauche. Le changement d'équilibre me fait pencher le buste vers l'arrière, pendant que ma jambe droite s'ouvre vers l'extérieur. Dans cette position, les muscles de ma cuisse entrent en jeu, dépliant ma jambe, et envoyant mon pied droit vers la fille. Une bonne démonstration d'un high kick, bien qu'il ne s'agit que d'un coup de semonce, le pied passant à quelques centimètres de son visage.

" Le respect, ça se mérite. "

L'hybride cilla au moment où le pied de la fille passa à quelques centimètres de son visage, trop furtivement pour que cette dernière ait pu cependant relever ce détail. Il fallait l'avouer, Darcy ne s'y était pas vraiment attendue. Bien sûr, elle s'était mentalement préparée à ce que l'élève qui lui faisait face perde patience et passe à l'offensive, offensive qu'elle avait d'ailleurs soupçonné en voyant ses mouvements changer. Cela dit, la semi-démone ne connaissait pas aussi bien cet art martial qu'elle ne voudrait l'admettre, et ne s'était pas préparé à ce mouvement en particulier.
Comme à son habitude, son flegme vint dissimuler sa surprise, tandis que son esprit d'analyse se mettait en marche. Elle était rapide, plus rapide qu'elle ne l'avait estimé, en plus de ne pas connaître ses passes. Darcy devrait se montrer prudente si elle voulait emporter un éventuel conflit à la loyale. Cela dit, elle était certaine d'avoir l'avantage de la force et de l'endurance, donc tant qu'elle parvenait à au moins parer les coups, ça ferait l'affaire.

Petit tic nerveux étouffé dans un sourire, accompagné d'un haussement d'épaule, puis d'un ton amusé.

Tu peux critiquer le fait qu'elle en vienne aux menaces, Darcy, il n'empêche que tu ne te prives pas d'en proférer depuis pratiquement le début de cette conversation. D'un autre côté, soyons honnêtes, l'hybride ne pense pas réellement être dans son bon droit en exigeant qu'elle déguerpisse. La vérité, c'est qu'elle s'en fiche plus où moins de l'endroit où cette gamine s’entraîne. La semi-démone pourrait très bien retourner dans la forêt pour finir sa sieste par exemple, ce n'est pas comme si elle devait absolument dormir sur l'arbre monde.
Pourquoi insister alors ? Par principe ? Allons bon, vous avez déjà vu Darcy s’embarrasser des principes et des valeurs ? Non, la vérité, c'est qu'elle joue la comédie, par jeu, comme à chaque fois qu'elle s'attire des ennuis. Que voulez-vous, lorsque l'on vit aussi longtemps qu'elle, l’ennui a tendance à se faire sentir, et les êtres humains sont les seules chose sur cette petite planète qui parviennent encore à l'intéresser de temps à autre.

C'est aussi pour cette raison que Darcy – contrairement à ce qui paraissait – n'espérait pas le moins du monde obtenir le respect de la combattante, au moment de prononcer ces derniers mots d'un ton soudainement monocorde :

La pratique d'un art martial par les combats ne servait pas juste à appliquer la théorie apprise. Cela permettait aussi de se former à la lecture de l'opposant. Savoir reconnaitre les signes révélateurs de son état, indépendamment de l'attitude affichée. Lors de mon coup de pied, la fille eut un léger raidissement de ses muscles, si infime que je faillis ne pas le voir. Et pendant qu'elle parlais, j'observais son corps.
Hum... Aucune variation. Pas de hausse du rythme cardiaque, que l'on pouvait déterminer en fonction de l'état des veines ou du rougissement de la peau ; pas de hausse du rythme respiratoire ; pas de perle de sueur ; pas le moindre tic nerveux. Pourtant, mon coup de pied l'avait légèrement surprise. Conclusion : elle avait pleine confiance dans ces capacités, mais sous-estimait les miennes. Ce n'est pas un avantage que je garderai longtemps, alors j'irai à pleine puissance d'entrée de jeu.

" Non. Mais voici le mien. "

Joignant parole et geste, mes bras se mettent en garde, coudes rapprochés et poings à hauteur de visage. Sans attendre, je franchis la distance qui nous sépare d'un bond, arrivant en appui sur la jambe droite, presque au contact. Je me sers alors de l'inertie comme un ressort, dépliant ma jambe dans un nouveau saut, cette fois sur place. Simultanément, mes poings pivotent, paumes vers l'exterieur, et mes doigts se déplient pour imiter des griffes. Un geste agressif, mais un leurre.
Quand on menace une personne au visage, les réflexes prennent le pas sur le raisonnement, et elle concentre instinctivement son attention et sa défense sur ce point précis. Et pendant que j'attire justement son attention via mes gestes de main, ma jambe gauche, qui était mon point d'appui arrière, se replie et part en avant. Technique complète : engagement au contact, feinte au visage, et coup de genou sauté au torse. Voyons comment elle prendra cette attaque.

Ainsi donc elle ne se contentait pas de fouetter l'air du pied pour dissuader quiconque l'embête un peu trop. Remarquez, les menaces sont plus facilement prises au sérieux lorsqu'elles sont mise à exécution une fois de temps à autres. Encore une fois, les mouvements de la gamine disaient vaguement quelque chose à l'hybride, sans pour autant qu'elle puisse les reconnaître de façon définitive. Le problème d'avoir vu trop de choses au cours de son existence.
La petite comble l'espace les séparant très rapidement pour engager un combat très rapproché, réaction logique au vu de sa taille. Sachant qu'elle n'aurait pas le temps de créer une zone de sécurité pour cet échange, Darcy recula simplement son pied droit afin de prendre ses appuis – histoire d'adopter la posture combative qu'elle n'avait pas prise jusqu'ici – tout en levant ses bras en guise de garde. Une bonne idée, à en juger par l'assaut qui allait se porter à son visa–...

La semi-démone s'en voulut de s'être faite avoir aussi stupidement avant même que son adversaire ne lui porte le coup. Voyons Darcy, avec quoi cette fille t'avait menacé l'instant d'avant ? Elle favorise les pieds aux poings ! Elle aurait clairement dû anticiper la feinte...
L'hybride pivota ses avant-bras vers l'intérieur, les rabattant brutalement vers le bas afin de dévier le coup de genou. Pas assez rapide, elle n'avait pu l'atteindre qu'au moment de l'impact. Ce dernier avait été réduit en intensité par cette intervention de dernière minute, mais le coup était toujours présent.

L'être partiellement démoniaque ne perdit pas d'avantage de temps et fit un très léger bond en arrière, juste assez pour creuser l'écart dont elle avait besoin entre elles, afin profiter de l'avantage de portée que lui procurait sa taille.
Elle laissa ensuite s’échapper un brève toux. Le coup précédent lui avait bloqué la respiration. Les lèvres de Darcy s'élargirent dans un rictus, alors que ses yeux perçaient son adversaire du regard. Ainsi, elle l'avait sous-estimé, voilà qui était intéressant...


L'hybride passa à l'offensive, avec un simple gauche-droite, histoire de tâter un peu le terrain. En tout cas, c'est ce à quoi cela ressemblait. Un jab du gauche, tout ce qu'il y a de plus banal, quoique légèrement orienté sur l'extérieur de la garde de la gamine, comme pour l'inviter à esquiver vers sa gauche. Puis vint le poing droit, rapide, direct, appuyé par un mouvement de hanche pour lui donner d'avantage d'impact, orienté vers le visage... Au départ.
Soudain, rotation du poignet, et de l'épaule, le coude de l'hybride se retrouve subitement relevé tandis que le poing – qui ne se trouvait alors plus qu'à quelques centimètres de la garde adverse – change d'angle et plonge en direction de la poitrine. Habituellement, ce genre de coup se voit venir justement parce que la rotation se voit dès le début du mouvement, sans quoi l'impact est très réduit. Cependant, Darcy profitait ici de sa force surhumaine pour donner de l’appui au poing, et ce même si elle changeait l'orientation au dernier moment. En bref, un sale coup. Voyons comment Mei l'encaisse.

Cette fille n'est pas mauvaise. Elle est parvenue à percer mon mouvement, et à mitiger l'effet de mon attaque. En rabaissant sa garde, elle a utilisé ses avant-bras pour dévier la course de mon genou au moment de l'impact, causant une déperdition d'énergie. Elle bondit ensuite en arrière, comme pour mettre une distance de sécurité.
Mon coup n'avait pas été pleinement effectif, mais j'eus la satisfaction de la voir tousser, preuve que même imparfaites, mes attaques restent puissantes. Puis la fille se remit en garde. Je resta sourde à ses tentatives de provocations, concentrée sur la distance qui nous séparaient, et qui lui conférait un avantage en raison de son allonge supérieure.

Puis elle passa à l'assaut, sous la forme d'un direct du gauche, que je n'eus aucun mal à dévier d'un geste de ma main droite. Son attaque suivante était un trop classique direct du droit, appuyé par une rotation de la hanche. Un coup téléphoné... Ma main gauche se déplie pour un blocage en frappe de paume. La technique : frapper le poing de l'adversaire pour stopper son attaque, et utiliser le retour de forces pour le déstabiliser. Main main droite se prépare à frapper.

Soudain, je vois son bras se plier, et son poing change de trajectoire. Mince, elle a de la ressource ! Son direct se transforme en coup plongeant au torse. En réaction, mon épaule déplie mon bras, mon coude se retrouve à hauteur d'épaule, et ma main se transforme en crochet ouvert vers l'extérieur. J'ai juste le temps d'attraper son poignet et dévier son coup avant l'impact. Au lieu d'une frappe directe, son poing percute le coté gauche de mes cotes, glissant à moitié dessus.
La douleur est supérieure à ce à quoi je m'étais attendue. Sa force est bien plus grande que je ne le croyais. Je cille sous le choc, mais lance quand même ma riposte.

Ma jambe droite s'avance, me rapprochant du corps de la fille. Ma main droite part en uppercut, visant son menton. Le point qui m'intéressait le plus, dans cet échange, c'était le fait qu'elle ait sa jambe gauche en appui avant. Et avec le recul de sa main gauche après son jab, elle me laissait une fenêtre de tir. Que l'uppercut soit effectif ou qu'elle le bloque, j'avais déjà l'ordre d'attaques suivant.
Dans un premier temps, l'uppercut du droit. Deuxième temps, descente du coude droit sur sa cuisse gauche, et extension du bras gauche pour repousser son droit droit. Troisième temps, repli de la main gauche sur l'épaule, et crochet du coude gauche au cotes, et retour en garde. Essaye de contrer cet enchainement !

Si l'hybride s'était attendu à ça... Face à un adversaire disposant de plus de force et d'allonge, il était logique de préférer dévier les coups plutôt que de les parer, d'autant plus que cela permettait éventuellement de jouer sur leur équilibre en retournant leur force contre eux. Rien d'étonnant donc à ce que cette petite cherche à l'intercepter de la sorte. En revanche, elle ne s'était pas vraiment préparée à ce que cette dernière parvienne à s'adapter aussi rapidement et parvienne à dévier un coup à la trajectoire aussi peu orthodoxe.
Une chose était certaine, elle avait des réflexes, nettement plus que la semi-démone en tout cas.

Une fois encore, Darcy avait laissé son adversaire se faufiler jusque dans sa zone de confort. Le souci, c'est que cela n'était pas dans ses intentions, contrairement au tout début où elle l'avait volontairement laissé ouvrir la danse. Décidément, cette petite peste était douée pour se créer des ouvertures.
Dans un premier temps, l'hybride pensa que Mei comptait profiter de son emprise pour déstabiliser Darcy, dont le poids s'était naturellement porté vers l'avant lors de son coup. Il n'en fut rien, la petite ayant opté pour un uppercut du droit que la semi-démone ne pu que se prendre en plein dans le menton. L'impact se répercuta jusque dans le cerveau de cette dernière qui avait eu la bonne idée – voyant qu'elle n'aurait pas le temps de bloquer le coup – de contracter les muscles de ses jambes en prévention. C'est que des impacts aussi mal placés, ça peut rapidement vous faire flancher et, quitte à perdre en mobilité, l'hybride préférait encore rester debout pour l'instant.

Le sourire de la fille aux yeux acier n'était plus présent sur son visage désormais. Seuls restaient les faibles traces d'une expression douloureuse qui s'effaçait déjà pour laisser place au sérieux. Quitte à ne pas l'emporter par la vitesse et les réflexes, Darcy se décida enfin à mettre à l’œuvre son meilleur atout : sa redoutable capacité d'analyse. Son regard se porta brièvement vers sa droite, ignorant complètement le reste du corps de son adversaire pour se focaliser sur sa propre main, que Mei écartait alors que son coude se rabattait sur le genou gauche de la créature démoniaque.
L'hybride savait qu'elle n'éviterait pas l'assaut à la jambe, étant incapable d'esquiver au risque de perdre l'équilibre. Sans l'uppercut précédent, l'histoire serait tout autre soit dit en passant. Cela dit, la gamine venait de faire l'erreur d'annoncer la provenance de son prochain assaut. Tu ne t'es pas créé une ouverture en écartant son bras droit pour rien petite, c'en est presque trop prévisible.

Le coude frappe la jambe, réaction musculaire. Tiens le coup saleté, le moment de céder n'est pas encore venu.

La main gauche de Darcy agrippe soudainement l'épaule droite de Mei, puis la rabat vers l'avant. Cette action avantageait la démone de trois façon. Le premier avantage avait été de couper toute possibilité à la gamine d''établir la légère rotation du haut du corps qui lui était nécessaire pour donner de l'élan à son coup de coude. Le second était de permettre à l'hybride de faire s'effondrer le centre de gravité de son adversaire, conduisant au troisième avantage : la création d'une ouverture.
Une ouverture pour quoi ? Probablement pour le coup de genou droit que la semi-démone avait lancé en direction du visage de la combattante, qu'elle venait justement de rabattre à portée.

Dans le même mouvement, l'hybride avait levé son bras droit – désormais libre de l'emprise de son adversaire – en prévision de ce qu'elle tentait d'éviter depuis le début de l’enchaînement. La jambe gauche de Darcy flancha au moment de porter le coup de genou. Qu'à cela ne tienne, la démone était ravie de la laisser faire ! De cette façon, elle pourrait transférer tout son poids dans le coup de coude descendant qu'elle rabattait sur Mei.
Darcy prit tout de même soin de ne pas y mettre trop de force, estimant que son propre poids aurait un effet suffisant sur l'impact, c'est qu'il ne faudrait pas lui casser quelque chose. De même, elle fit de son mieux pour ne viser ni la clavicule, ni la nuque. L'idée n'était pas de tuer une pauvre innocente venue s’exercer non plus.

Que Mei esquive ou non, l'hybride aurait sans doute le temps de se relever après la chute. En cas d'esquive, une simple balayette afin de forcer une retraite devrait le faire. Dans le cas contraire, l'adversaire s'effondrerait également, et une simple roulade sur le côté creuserait la distance avant de se redresser.

Le poing percute le menton, le coude frappe la cuisse. Les deux premiers temps de l'enchainement sont passés, reste le troisième. Soudain, je sens mon épaule droite être empoignée, et tirée en avant. Flute et mince, ce coup-ci, c'est moi qui ai sous-estimé mon adversaire ! J'avais pensé la prendre par surprise avec le coup de coude, ce qui aurait détourné son attention de ce qui se passait à sa droite. J'ai grandement sous-estimé sa capacité d'abstraction et d'analyse. Il faut que je retourne la situa-

" Ak ! "

Sans prévenir, son genou droit vient percuter mon visage. Plus exactement, le coup me frappe juste au dessus de mon œil gauche. Le choc et la douleur m'aveuglent temporairement. Quand je rouvre les yeux, c'est pour voir la jambe gauche de la fille flancher. L'adrenaline se répandant dans mon cerveau, celui-ci analyse bien plus vite qu'à la normale. La suite tient plus de l'instinct que de la vraie réflexion. Constatant que son appui gauche est affaibli, et sa jambe droite juste à portée, mes mains ceinturent son genou droit. L'idée était de simplement la gêner pour se redresser.

Je ressens alors un choc dans le dos, et une vive douleur. Après coup, il est facile de se dire qu'une telle attaque était prévisible, mais dans le feu de l'action... Son bras droit, libre de ses mouvements, m'avait frappée du coude. Le point positif était que l'impact avait eu lieu sur les cotes. Une douleur vive, mais passagère, bien moins handicapante qu'une frappe à la clavicule ou la colonne vertébrale. En revanche, il me faudra être prudente, et ne pas la réveiller en prenant un nouveau coup dans cette zone...

La fille tombe au sol, alors que je suis parvenue à conserver mes appuis. Je rétablis grossièrement mon équilibre, et constate deux choses : d'un, son coup de genou m'a ouvert l'arcade sourcilière, et le sang gêne ma vision de l'oeil gauche ; de deux, j'ai réussi à conserver ma prise sur sa jambe, bien que je la tienne maintenant par la cheville et non par le genou. C'est le moment ou jamais.
Serrant les dents en endurant la douleur, je fais passer la jambe droite derrière la sienne, plie le genou, et fais revenir mon pied entre ses jambes. Vu de l'extérieur, la position donne : elle est allongée au sol, moi debout, tenant sa jambe droite. Mon pied droit est entre ses jambes, juste sous son bassin, et mon mollet droit est en contact avec le dessus de sa cuisse droite. Mon genou se plie autour du sien, formant un coude sur la partie extérieure de son articulation. Enfin, le reste de sa jambe remonte le long de ma cuisse, son talon étant en contact avec ma hanche.

De ma main droite, je maintiens son pied ainsi. Pour passer cette prise, j'ai besoin que son pied soit bien verrouillé. Comment se déroulera la prise ? Une fois verrouillée, j'effectuerai un quart de tour sur la droite. Ma jambe droite causera ainsi un effet de levier sur la sienne, et forcera sa hanche à pivoter sur l'intérieur, un mouvement d'ordinaire impossible à réaliser en raison des contraintes musculaires. Oui, ma prise est un mouvement conçu pour détruire l'articulation de la hanche.
Cela dit, ce n'est pas mon objectif. Je vise juste à lui infliger une vive douleur, pas lui causer une luxation ou une rupture ligamentaire. Une douleur de ce type est suffisamment rémanente pour empêcher l'articulation de fonctionner pleinement pour quelques minutes. Dès que la résistance à l'effort commencera, je casserai le verrou en lâchant son pied. Je serai alors en parfaite position pour plonger plus loin, où je n'aurais qu'à me réceptionner en roulade avant de repartir en garde.

Décidément, cette petite sait se montrer tenace. Darcy s'était bien attendu à ce qu'elle tente quelque chose, ce n'était pas non plus comme si elle pouvait exiger de son adversaire de gentiment se laisser malmener sans riposte, mais de là à lui attraper la jambe en pleine action...
Voilà que l'hybride se retrouvait désormais dans une situation qui serait plutôt embarrassante pour nombre de personnes. C'est qu'à cause de cette soudaine prise, le coup de coude de la démone n'avait pas eu autant d'impact que prévu et l'avait empêché d'emmener Mei au tapis. Darcy se retrouvait donc seule au sol, allongée sur le dos, avec cette fillette qui s'affairait déjà à plier sa jambe dans des angles que l'hybride prévoyait peu naturels pour les articulations.

Une fois encore, la fausse brunette conserva son calme et prit le peu de temps qu'il lui fallait pour analyser la situation, sachant qu'en dernier recours la prise n'aurait aucun effet de toute façon. Sa jambe gauche était encore libre et à même de signaler sa présence à la petite, avec toute la brutalité requise au besoin. La jambe droite étant prisonnière, la balayette prévue à l'origine était exclue. Un coup au foi peut-être ? Les bras de l'adversaire gênaient la trajectoire, même chose pour ce qui était de frapper dans les côtes qu'elle avait frôlées du poing plus tôt.
Qu'à cela ne tienne ! Si les bras gênent les coups, frappons les bras ! La jambe de la créature fendit l'air, visant légèrement au dessus de la partie extérieure du coude. Quitte à écarter le bras, autant tenter de générer un influx nerveux. Les fourmis dans le bras, c'est toujours handicapant en plein combat.
La voix désormais libre sur les régions qu'elle souhaitait cibler auparavant, Darcy ne manqua pas de plier la jambe à la fin de son mouvement, puis la tendre à nouveau pour la rabattre en direction de son adversaire. Peu importe que ça touche ou non, l'idée était de forcer la retraite et ainsi libérer son membre inférieur droit. Quoi qu'il en soit, esquive ou non, sa prise serait suffisamment affaiblie pour que l'hybride se libère.

Après quoi, Darcy plaça ses mains contre le sol, derrière ses épaules en les passant par-dessus, replia ses jambes – désormais libres – au dessus d'elle, puis les lança vers les ciel en forçant sur ses abdominaux. En simultanée, elle prit appuis sur ses mains afin de faire suivre le haut du corps, le tout pour finir debout d'un seul mouvement. Une façon de se relever qui avait le mérite d'être à la fois rapide et classe. Et tout le monde sait qu'en pleine baston, en envoyer plein la vue est aussi important que de porter des coups.

Parlant de guerre des nerfs, il serait peut-être temps de la troubler un peu celle-là... Ou semer les graines de la victoires dans un premier temps :

L'hybride accompagna les paroles suivantes d'un léger haussement d'épaules, prenant même le luxe de quitter son adversaire du regard, alors qu'elle était encore dangereusement près. De toute façon, il y avait une chance sur deux qu'elle soit trop perturbée, en constatant que Darcy connaissait son nom, pour passer à l'offensive dans la seconde qui suivait.

La dentition de Darcy vint parfaire son expression hautaine dans un sourire narquois.

J'avais réussi à verrouiller ma prise, mais la fille ne se laissa pas faire. Sa jambe gauche frappa mon bras droit. Le choc me fit perdre ma prise sur sa cheville, du coup, je ramène mes bras en garde, craignant qu'elle ne profite de l'occasion. Grand bien m'en prit, puisqu'elle me frappa ensuite d'un coup direct de son pied. J'encaisse le choc pendant qu'elle se relève, assez acrobatiquement.

Ma blessure à l'arcade sourcilière saigne directement dans mon oeil, gênant ma vue. Pour autant, ça faisait longtemps que je n'avais pas ressenti ce frisson dans mon corps. L'excitation du combat, savoir que j'affrontais un adversaire au moins aussi fort que moi. La fille commença à me parler, mais je ne fis pas attention. Je voulais juste la combattre, jusqu'à épuisement d'elle ou de moi.

Profitant de son absence de garde, je bondis en avant pour une frappe au torse, en trois points. es poings descendent au niveau de mon ventre, et mon genou part en avant. Profitant de l'élan qu'il me donne, ma jambe d'appui me propulse plus en avant. Au moment de l'impact, j'envoie mes poings en avant, frapper juste au dessus de mon genou.

Une telle frappe, quand elle touche, est très déstabilisante, en raison de toute la force déployée juste au niveau du centre de gravité de celui qui la reçoit. En général, sous le choc, la personne part alors en arrière, me laissant une ouverture très exploitable. Et puisque cette fille veut faire dans l’esbroufe, je lui réserve un coup tout indiqué.

Après mon attaque, je profiterai de mon élan pour rebondir, cette fois en salto avant. Outre le coté visuel, ce mouvement permet de libérer un axe kick dévastateur. Clairement, mon pied passe ainsi au dessus de ma tête, et utilise l'inertie de mon corps en rotation pour développer une énergie cinétique impressionnante. En utilisant l'os du talon comme point d'impact, un tel coup peut facilement briser un membre...

Les yeux de Darcy s'écarquillèrent à l'instant même où Mei prit ses appuis. L'hybride interrompit la nouvelle réplique qu'elle était sur le point de lancer avant même d'avoir commencé de l'énoncer. Cette fille... Elle venait de complètement l'ignorer.

Honnêtement, Darcy n'aurait su dire à qui elle en voulait le plus sur ce coup. Était-ce un sursaut d'orgueil d'avoir été de nouveau victime de la capacité d'abstraction de cette gamine turbulente ?
A moins que l'erreur ne vienne d'elle-même... Peut-être avait-elle mal jaugé la situation. Peut-être qu'elle avait trop attendu, joué trop longtemps avec son corps avant d'attaquer son esprit. Quelques échanges plus tôt, la démone aurait sans doute pu jouer cette carte, déstabilisant Mei un peu à l'avance pour l'empêcher de se plonger pleinement dans le combat, et être ainsi capable de se maintenir une prise de disponible au cas où elle souhaiterait s'en emparer.
Au lieu de cela, elle avait trop attendu, laissant à la combattante le temps de lisser suffisamment sa carapace pour empêcher Darcy d'y glisser ses ongles pour l'ouvrir.

Mei décolle en avant. Pas le temps d'esquiver. Que faire ? Une parade ? Sa garde est bien trop basse. Tenter de porter un coup pour lui rendre cette action moins rentable ? Elle n'aurait pas le temps pour lui donner assez d'ampleur. Encaisser le coup et préparer une parade à l'attaque suivante alors ? Oui, c'est ce qui semblait être le meilleurs choix. De cette façon, Darcy l'aurait à l'usure...

… Non, c'est ce qu'elle fait depuis le début du combat. Cela ne ferait que conforter Mei dans ses prises d'initiatives. Fini de diriger le pas ma petite, on change de rythme pour la danse suivante.

Les poings et le genou de la combattante heurtèrent la démone de plein fouet, dans un craquement sonore des plus désagréables à l'oreille. Le corps de la fausse brune parti dans un premier temps en arrière, jusqu'à ce que son pied droit – qu'elle avait commencé à reculer au moment de l'impact – ne touche à nouveau le sol. En cet instant, la force ahurissante de la créature se concentra dans sa jambe, qui stoppa brutalement le mouvement de recul.

Le bruit de craquement surgit de nouveau du torse de l'hybride.

Devant l'incapacité de sa colonne vertébrale à se plier d'avantage vers l'arrière sous la puissance du choc, Darcy fut victime d'un retour de force qui renvoya le haut de son corps vers l'avant. Puis la scène se figea.
La déjà quadri-centenaire était encore debout, le front posé sur l'épaule de son adversaire. Cette dernière ne tenait plus d'ailleurs que sur un pied, d'avantage par contrainte que par choix. La démone tourna sa tête vers l'extérieur, puis cracha un léger flot de sang au travers de sa chevelure.

Un épais amas osseux, aussi désordonné que grotesque, sortait directement du torse de la brunette depuis là où étaient supposées se trouver ses côtes et s'entremêlaient autour des poings et du genou de la gamine. Cette dernière était alors à même de constater que son coup n'avait jamais réellement atteint sa cible, une quantité improbable d'os ayant également bloqué le passage et amorti une bonne partie du choc, au point que certains s'étaient même fissurés sous la violence de l'impact. Le bruit s'expliquait enfin.

Les yeux argentés du monstre se plongèrent dans ceux de l'élève. Elle essuya le sang qui s'écoulait de sa bouche du revers de la main gauche avant de reprendre :

Elle ponctua sa phrase d'un revers de la main droite porté en plein visage de Mei, désormais dans l'incapacité d'esquiver quoi que ce soit. Cette fois-ci, la retenue n'était plus de mise. Darcy avait suffisamment investi de sa brutalité héréditaire dans le coup pour qu'il puisse déboîter une mâchoire. En tout cas, celle de la gamine aurait probablement cédé si l'hybride n'avait pas eu la présence d'esprit de la libérer de son emprise au même moment.
En effet, les os s'étaient légèrement rétractés à l'instant même de l'impact, comme pour épargner à la combattante la perte de ses dents. Au lieu de ça, elle aurait droit à une belle perte d'équilibre, un bond d'un mètre en arrière et une éventuelle chute.

La seconde d'après, la créature démoniaque porta son regard sur sa main droite. Cette dernière s'était désormais élargie, prenant sans crier gare un aspect grotesque et repoussant. L'hybride replia ses doigts fins – dont la longueur avait aisément doublé – pour les observer de plus près. Ces derniers semblaient s'être recouverts d'une sorte d'exosquelette marron au niveau des phalanges, semblables à celui des cafards.
Curieux, elle ne se souvenait pas avoir transformé sa main au moment de donner son coup. S'était-elle emporté ?

Cela dit, la surprise n'était pas lisible sur le visage redevenu impassible de Darcy. La seule chose qui lui échappa pendant l'examen de sa propre main fut un léger soupir. Après quoi elle posa la paume ce nouveau membre répugnant contre son front sans la moindre gêne apparente. Un mouvement qui, semble-t-il, eut pour effet de rendre au monstre son sourire trop parfait pour ne pas être feint.

J'ai la satisfaction d'entendre un craquement sec au moment de l'impact, signe que mon coup fut efficace. J'espère que cette fois, cette fille a comprit la leçon. Et pour m'en assurer, un coup de talon à l'épaule la calmera définiti...

Minute. Je n'arrive plus à bouger mes mains ! Je baisse le yeux, et le regrette aussitôt. Mes poings et mon genou sont prisonniers d'un amas osseux sortant directement du torse de la fille. C'est... répugnant ? Révoltant ? Ignoble ? Je n'arrive pas à trouver un qualificatif assez fort pour décrire ce que je ressens. J'essaye de me libérer, mais autant lutter contre un étau industriel...

La fille en profite pour me frapper de sa main droite. Bloquée comme je le suis, impossible de faire quoi que ce soit : sa main percute ma joue dans un claquement retentissant. Sous le choc, je pars en vrille, et tombe à terre. Un gout métallique emplit ma bouche : je me suis mordue la joue. Je constate aussi que je suis libre. Une chance, sinon j'aurais été passée à tabac.
En levant les yeux, je constate que sa main droite a doublé de volume, se recouvrant d'une corne brune. Repoussant. C'était quoi tout ça ? C'était quoi cette fille ?

En tout cas, je devais reprendre l'offensive, et vite. Même si c'est un monstre, j'ai tout de même regardé la mort en face une fois. Je ne suis pas encore complètement hors-jeu.
Je fais tourbillonner mes jambes en me servant de mon bassin comme pivot. La jambe gauche part sur la droite, passe au dessus de mon corps et revient par la gauche,suivie de ma jambe droite. Le mouvement devrait l’empêcher d'avancer. Je termine la rotation en posant le pied droit à plat au sol, jambe gauche pliée dessous, tout en utilisant l'inertie du mouvement pour me redresser. Je pousse alors avec ma jambe gauche, ce qui me permet de partir en roulade vers l'avant. Objectif : asséner un coup de talon sur les pieds. On verra après ça.

Quoi, c'était tout ? Une seconde ou deux avec une expression choquée sur la face et on repartait pour un tour de piste ? C'était quoi cette réaction de merde ? Bon, d'accord, elle n'était probablement pas du genre à rester tétanisée, ni à se rouler en boule en tremblant comme une feuille, mais tout de même ! Darcy aurait au moins espéré pouvoir se délecter de l'expression de son visage plus longtemps. Alors quoi, elle est déjà au courant de l'existence du monde magique ? Pourtant l'hybride aurait juré que non au vu de son comportement précédent.

Mei se couvrit à l'aide de ses pieds le temps de se redresser, histoire que le monstre se prenne un bon coup s'il tentait de venir au contact dans ce laps de temps. Une précaution bien inutile considérant le fait que Darcy n'avait eu aucunement l'intention de continuer l'offensive.
Bon, c'était quoi la raison ? La baffe lui avait déplacé le cerveau ou bien... ? Non parce que tout de même, ça n'avait pas l'air de la perturber plus que ça de retourner au combat face à un adversaire dont les côtes dépassaient du thorax. D'ailleurs, elle n'en a pas marre de se battre comme ça ?

Ne fait pas l'erreur de la lasser, Mei, tu le regretterais.

L'hybride baissa son regard en direction des jambes de la combattante lorsque ces dernières touchèrent le sol, et observa ses appuis d'un air morne. Un assaut frontal ? Dans ce cas...

Les côtes de Darcy finirent de se rétracter, effaçant toute trace de leur précédente sortie. Les vêtements de la semi-démone étaient même restés intacts, alors que les pointes osseuses les avaient définitivement traversés lors du procédé.
Mei se lança dans sa roulade, Darcy se pencha en avant aussitôt, donnant à sa main gauche la même apparence rebutante que la droite, tout en exécutant un pas en avant. Preuve que la combattante ne connaissait pas l'existence de la magie jusqu'alors : elle continuait de se battre comme si elle affrontait une humaine, bien qu'elle sache que ce ne soit pas le cas. D'un autre côté, on ne pouvait guère lui reprocher, elle ne fait que reproduire ce qu'elle connaît.

Les deux pattes grotesques de la démone s'emparèrent des pieds de la fille alors qu'elle était sur le dos, avant qu'elle puisse terminer sa roulade, la solide carapace protégeant les mains de l'hybride de l'impact. Darcy tira immédiatement dessus afin de forcer les jambes à se tendre tandis que Mei ne pouvait rien faire d'autre face à tant de force que se retrouver sur le dos.

Dans le même mouvement, la fausse brune lâcha la jambe gauche de son adversaire, fit passer sa jambe droite derrière la sienne, plia le genou, et fit revenir son pied entre ses jambes. Une vague impression de déjà vu peut-être ? A l'exception du fait que la dernière fois, c'était Mei qui réalisait cette prise sur la créature, non l'inverse. Essaie donc de te libérer, petite ! Le niveau de force n'est pas le même ici, tu ne pourra pas t'en sortir de la même manière qu'elle l'avait fait.

Un sourire malicieux se dessina sur le visage de Darcy. Enfin... disons plutôt le visage de Mei, étant donné qu'elle venait tout juste de prendre son apparence. Comme à son habitude, l'hybride avait réalisé une réplique parfaite, jusque dans les moindres détails vestimentaires. A la différence que, contrairement à l'original, son visage ne présentait aucune blessure.

Ou pas ! En réalité, elle n'avait fait que tourner le haut de son corps, laissant ses jambes parfaitement immobiles, fort heureusement pour la hanche de Mei.

Des mots prononcés au cours d'une imitation des plus convaincantes. Encore que si le timbre de la voix était identique, on pouvait déceler dans l'interprétation de Darcy de légères modifications, comme le ton enjoué sur lequel elle avait lancé sa réplique, comme pour contraster avec le manque d'expression qu'avait eu l'original avant l'affrontement.

Le clone de Mei libéra la vraie de sa propre prise, réalisant une rondade dans le même mouvement pour prendre de la distance. A l'atterrissage, la copie fit un tour sur elle-même, telle une fillette tournoyant pour s'admirer après avoir enfilé sa nouvelle robe de princesse.
Lorsqu'elle fit de nouveau face à la combattante, Darcy avait de nouveau changé d'apparence... enfin plus ou moins.
L'hybride arborait toujours les traits de Mei, cependant elle y avait apporté de légères modifications. Tout d'abord, elle portait désormais l'uniforme de Mahora, tenue qui se trouvait être impeccable et sans la moindre trace d'une quelconque négligence. Ses cheveux étaient également détachés, et descendaient en cascade dans son dos, laissant dépasser ça et là quelques pointes qui rebiquaient vers l'extérieur, et toujours avec ces deux mèches qui encadraient son visage.

Darcy posa sa main droite sur sa hanche, puis le bras gauche en avant, comme pour admirer ses ongles qui n'étaient pourtant pas vernis, un sourire presque sincère ornant le visage de Mei.

A voir quel effet ça lui fait de se voir ainsi. Après tout, ce n'est pas tous les jours qu'un monstre s'amuse à changer votre look en face de vous après avoir prit votre apparence, le tout en se montrant plus expressif que vous ne l'êtes.

Et mince, la fille intercepta ma roulade à mi-chemin. Du coup, je me retrouvais dans la même position qu'elle un peu plus tôt. Et quand je dis même position, c'est vraiment ça qu'il faut comprendre, puisqu'elle tente de me faire la même prise à la hanche. Pour le coup, c'est idiot de sa part. Si je connais une prise, je connaissais également son contre, chaque artiste martial savait cela. Et le contre est simple : accompagner la rotation de la...

Me pensées se bloquent quand mon regard croise le sien, ou plutôt le mien. Car oui, c'est moi qui est en face de moi. C'est à n'y rien comprendre. Ou alors, c'est cette fille qui aurait prit mon apparence ? Comment ? C'est quoi ce délire ? Je rêve ? Ou je cauchemarde ?

J'en suis tellement perturbée que je rate le moment où elle effectue sa rotation qui devait me vriller la hanche. Je m'attends à la douleur, mais elle ne vient pas. L'explication me secoue l'estomac : seule la partie supérieure de son corps a pivoté. Et ce n'était pas une simple torsion des épaules : tout son torse était aligné. Une telle rotation est tout bonnement impossible pour un corps humain !

Cette fille s'échappe en une roulade, la même que la mienne, pour se retourner un peu plus loin. Et j'eus un deuxième choc.
Car si c'était toujours moi que je voyais, je portais cette fois l'uniforme de Mahora ! C'était pire que du délire. Un vrai cauchemar. Je ne trouvais rien d'autre à faire que de me regarder, alors que cette fille qui avait prit mon visage et mon corps s'admirait sous toutes les coutures. Même sa voix était devenue la mienne...

Les dents de la seconde Mei, rougies par le sang de Darcy, firent une brève apparition lorsque celle-ci vit la réaction de celle qu'elle copiait. L'expression de cette dernière était pour le moins délectable. Et bien que tous les humains normaux réagissaient de la même façon lorsque l'hybride révélait ses talents cachés, il s'agissait là de l'une des rares visions dont elle ne s'était pas encore lassée. La raison étant que l'occasion ne se présentait guère souvent. Encore que depuis les dernières années à Mahora, la fréquence de l’évènement s'était nettement accrue...

Allez petite, parle-lui donc ! Darcy est à peu près certaine qu'il t'en reste suffisamment dans les tripes pour retrouver l'usage de la parole ! Encore que ta confiance avait l'air d'avoir réalisé une sacré chute... Les côtes qui sortent du torse et la main monstrueuse, ça passe, mais son propre reflet non ?

Constatant que Mei mettait du temps à recouvrer ses esprits, un peu trop au goût de la démone en tout cas, celle-ci courba légèrement l'échine, plaça sa tête entre ses mains, les doigts crispés dans sa nouvelle chevelure, les yeux écarquillés et les lèvres tremblantes.

Darcy avait reprit un air détendu, ainsi que son apparence, pour se répondre à elle-même. Elle continua ainsi son petit manège, regardant vers la droite lorsqu'elle imitait une Mei fébrile et en état de choc, puis vers la gauche lorsqu'elle reprenait sa forme usuelle, comme pour jouer une pièce dont elle incarnait tous les personnages.

La fausse Mei blêmi, se courba d'avantage, les doigts crispés au point qu'elle en semblait prête à s'arracher les cheveux, alors qu'elle marmonnait des phrases dont les seuls mots audibles furent « impossible » et « cauchemar ».
Puis, l'imposteur s'immobilisa. Ses doigts se détendirent et elle se redressa face à l'original, un sourire en coin accroché aux lèvres. Elle accompagna ensuite ses paroles d'un haussement d'épaules.

Une inquiétude pour une fois sincère. Disons que Darcy avait conscience de sa manie de se laisser emporter dans ces moments là et de trop en faire. Elle a beau connaître particulièrement bien l'esprit humain, il est difficile de jauger à l'avance jusqu'où on peut se permettre d'aller au moment de briser leur rationalité. En voyant que Mei était resté d'aplomb en voyant ses côtes sortir, la démone l'avait estimée relativement solide de ce point de vue là, mais peut-être qu'elle était allée un peu loin avec cette petite scène...

Ma copie m'offre un petit théâtre de son cru. Un théâtre grotesque. Je ne peux rien faire d'autre que regarder, à la fois révulsée et fascinée. Un vrai dédoublement de la personnalité, le corps en prime. Je voyais la fille (en était-ce vraiment une ?) changer d'apparence comme si de rien n'était, jouant une petite scène où se mêlaient moqueries et explications. Pour finir, elle me lance une ultime pique, à propos de mon état mental.

Après la consternation, la panique, l'effroi, vient la colère. Contre moi, pour m'être montrée faible, et contre elle, qui se paye ma tête. Péniblement, je me redresse, et lui fait face. Ou plutôt, je me fais face. Mei, tu es faible. Trop faible. Et tu l'as laissé voir. Après tout ce par quoi tu es passée, tu te retrouves là ? C'est digne de toi, ça ? Le Muay Thaî, c'est juste du vent ?

En colère contre moi, je passe soudainement à l'assaut de ma copie.
Muay Thaï. Une boxe à huit points. Mains, pieds, coudes, genoux. Cette fois, plus de techniques élaborées. Juste une déferlante de coups. Pas de temps mort, juste un assaut perpétuel. Frapper, encore et encore. Chaque coup n'est que l’annoncement du suivant. Chaque extension d'un membre est la prise d'élan de l'attaque à venir. Je me suis transformée en un tourbillon furieux.

Le regard dédaigneux de la copie eu tout le loisir d'observer la colère dans celui de son original alors qu'elle se redressait. Une belle expression qu'arborait Mei, Darcy l'aimait bien, ça la rendait plus vivante.
Une série d'images défila rapidement dans l'esprit de l'hybride. Oh ? On se remémore les instants difficiles afin de se remotiver ? Tu penses sérieusement que ce genre de chose va t'aider à triompher ? Tu ne le sais certainement pas Mei, mais ton adversaire a déjà subit bien plus d'épreuves que tu n'auras jamais le temps de connaître dans ta courte vie. Tout ceci ne l'aura pas rendue plus forte bien évidemment, juste plus amère. La naïveté humaine ne cessera jamais de l'exaspérer...

Darcy n'afficha aucune réaction aux pensées qu'elle venait de percevoir chez son adversaire. Inutile de révéler toutes ses cartes pour l'instant. De toute façon, c'est grâce à sa supposée force que Mei se permet son comportement. L'idée étant de lui donner une petite leçon en la mettant au tapis, la briser mentalement n'était donc pas d'actualité, aussi alléchants soient les souvenirs qu'elle avait entrevus.
N'empêche, voilà qui lui rappelait sa comptine favorite :

Oups ! Pas le temps de se la réciter en songes, c'est que Mei y allait pour de bon ! A défaut de trouver une ouverture, l'hybride resta dans un premier temps sur la défensive. Une défense qui demandait déjà un gros effort de concentration au vu de la cadence imposée par l'artiste martiale. Les assauts venaient continuellement de toute part et la démone n'arrivait qu'à péniblement se protéger de la grande majorité des coups, forcée de laisser passer les moins dangereux.
D'un point de vue extérieur, on pourrait aisément penser que la combattante s'était reprise. Mais aux yeux de Darcy, la vérité était tout autre : c'était elle qui était à l'avantage ici. Elle était parvenu à éroder le bon engrenage de la mécanique bien huilée dans l'esprit de son adversaire. Le rythme de l'horloge s'en voyait perturbé et cela se ressentait déjà. Mei était animée par la colère, elle frappait pour blesser. Les feintes se faisaient moins nombreuses, les coups plus prévisibles. C'était tout ce dont l'hybride avait besoin.
Avantage supplémentaire, la créature avait désormais l'apparence de son opposant, faisant d'elle une cible plus petite. Sans compter que le sang sortant de la blessure de l'originale lui créait un angle mort supplémentaire à exploiter en cas de besoin.

Maintenant il ne lui restait qu'à limiter au maximum ses mouvements, parant au maximum les coups et n'esquivant que si vraiment nécessaire et laisser l'adversaire s'épuiser. Chose qui – au vu du rythme qu'elle s'imposait – ne tarderait pas à arriver.

Un coup de coude frappa soudainement Darcy sur la joue gauche dans un bruit sourd. Cependant, ce ne fut pas une contusion qui apparu au niveau de la mâchoire de cette dernière, mais une étrange trace d'un bleu très clair et légèrement transparent. En effet, la peau et la chair de la créature semblaient avoir été subitement remplacées par un bloc de glace dans la région frappée. La surface s'était même fissurée à l'impact.
L'hybride posa sa main sur la paroi froide – tout du moins en apparence – avec une moue boudeuse.

Comme si ce n'était pas assez perturbant de voir un clone de soit réagir de la sorte, il avait fallu en plus que Darcy utilise sa propre voix. Pour le coup, ça lui avait semblé plus naturel au vu du ton employé. Un ton dépourvu de toute trace de colère, de souffrance ou de rancœur. Disons qu'on aurait plutôt dit un enfant pénible exigeant qu'on cesse de l'embêter avec son célèbre « Arrê-teuh ! ».

Dans la pratique, l'auteur n'avait juste pas envie de mettre du texte en gras.

La main de l'hybride sembla gonfler brièvement, puis se déchira de l'intérieur, laissant pousser à sa place d'énormes pointes de glace grossièrement taillées. Darcy fendit l'air avec ce nouvel appendice, le tranchant de ses nouveaux doigts faisant office de griffes. Le but de la manœuvre était ici de forcer une légère retraite de Mei. De cette façon, la copie monstrueuse s'assurait un bref instant de répit, tout en perturbant le rythme de la combattante, épuisant ainsi ses réserves plus rapidement.

La main griffue de Darcy se plaça devant sa bouche le temps d'un bâillement exagérément long.

Une information qui n'était pas entièrement exacte à vrai dire. Rappelons que la demoiselle (ou dame, tant qu'à être dans l'exactitude) n'est qu'à moitié une démone.

Je souffle. Cette offensive de ma part est loin d'être une réussite. Certes, une partie de mes assauts est passée, mais il ne s'agissait que de coups secondaires, sans réelle conséquence. De son coté, la fille avait conservé mon apparence, bien qu'elle ai fait sortir d'etranges griffes de glace de sa main droite.
Après la période de trouble face à ce clone, puis la fureur, vient le temps de la réflexion. Clairement, je ne battrais pas cette fille. Elle a une grande expérience et de l'endurance, plus son étrange faculté. Par contre, prendre mon apparence, maintenant que j'y suis habituée, pourrait passer à mon avantage. En effet, elle a mon corps, mais pas mon esprit, et j'ai déjà eu la preuve que ma science du Muay Thaï pouvait prendre l'ascendant sur son expérience. De plus, je connais mon corps, je peux estimer la portée de ses coups mieux que quiconque.

Le problème reste néanmoins entier : je ne la battrais pas, sauf énorme coup de chance. Puis je ressens une sensation familière, mais que je n'avais plus ressenti depuis un bon moyen : l'excitation du combat. Donner le meilleur de soi dans un affrontement, même si la défaite est inelluctable. Tout ces combats faciles au collège avaient étouffé cette émotion, pouvoir la ressentir à nouveau est grisant. Je me redresse, essuie le sang de mon oeil, et fixe la fille. Je tends un doigt vers elle.

" Iku yo ! "

Je je bondis en avant. Cette fois, pas question de coups précipités comme la dernière fois. Ce coup-ci, se sera des frappes réfléchies, des feintes et autres techniques de Muay Thaï. J'ai d'ailleurs quelques exemples. Si elle tente de me frapper avec ses griffes, je peux lui attraper le poignet et partir en low kick sur sa jambe avant, puis remonter en high kick. Sinon, je peux aussi aller au contact et utiliser des frappes du coude, plus difficiles à parer si je suis collée à elle...

Voilà qu'elle se croyait dans un shônen maintenant, en la pointant du doigt en annonçant triomphalement son retour sur le ring. C'était trop demandé que d'admettre ta défaite ? Enfin, pourquoi pas ? Après tout, n'arrive-t-il pas aux proies de faire preuve à leur tour de férocité envers leur prédateurs lorsque la fuite n'est plus une option ?
Cela dit, ce n'était pas faute à Darcy de lui avoir laissé une porte de sortie. Fini la rigolade, l'heure de l'humiliation a sonné. Elle la mettrait à terre au prochain coup.

En réponse à l'annonce de Mei, la seconde main de l'hybride vint imiter la première, se transformant à son tour en amas d'épaisse griffes aux reflets cristallin. Ainsi, la démone annonçait clairement son intention de les utiliser pour le combat à venir, profitant de leur tranchant ainsi que l'allonge supplémentaire qu'elles octroyaient. Une belle farce en réalité, mais si Dacry les avaient rétractées, son adversaire aurait alors redouté le coup fourré et ne se jetterait pas au contact avec autant d'ardeur. Elle avait beau avoir retrouvé de sa superbe, elle ne restait que l'écervelée d'avant le combat, celle qui ne se fiait qu'au danger qu'elle percevait, rugissant tous crocs dévoilés, sans redouter le moins du monde celui tapis dans l'ombre d'une branche, attendant avec patience que ses proies viennent s'offrir à sa toile.

Des griffes comme celles qu'arborait Darcy, ça tranche, ça se plante, mais ça ne se plie pas, elle ne peut rien faire tant qu'elle ne leur donne pas d'élan, tant qu'elle ne fend pas l'air d'un coup de tranche ou d'estoc. Mei ne manquerait pas de le noter et de se mettre plus proche que jamais de son adversaire afin de lui en priver l'occasion, et la copie comptait bien là-dessus.
L'originale avait parcouru la distance qui la séparait de son clone en légèrement plus de temps qu'elle n'aurait dû. La fatigue avait fait son œuvre, mais le monstre restait la plus lente malgré tout. La créature prit la décision de se mettre en garde, les coudes serrés devant son torse, le visage bien à l'abri derrière ses membres acérés.

Un coup de coude. Ça, en revanche, elle ne l'avait pas anticipé. Presque par réflexe, Darcy pivota son torse sur le côté et écarta son coude droit pour l'envoyer à la rencontre de celui de Mei. Ce faisant, elle exposa ainsi son flanc gauche. Une faille que la combattante ne manquerait pas d'exploiter afin de malmener ses côtes, sachant pertinemment que la créature n'aurait pas le temps d'interposer à nouveau ses bras.

Et ce serait là sa perte.

Comme l'avaient fait auparavant les côtes de la démone, d'épaisses stalactites jaillirent sur le côté du torse de cette dernière afin d'entraver le membre dont s'était servi son adversaire, quel qu'il fut, pour frapper. Sans lui laisser le temps de réagir à cette nouvelle prise, les doigts de la main droite de la fausse Mei – ayant alors reprit une apparence humaine – fondirent sur la gorge de l'originale avec autant de vivacité et d'assurance que les serres d'un rapace.
Les épais cônes de glace se rétractèrent, laissant à la combattante tout le loisir de constater la force de Darcy, alors que cette dernière la soulevait à trente centimètres du sol d'une main.

Les yeux désormais acier du clone fixèrent le visage suffocant de la véritable Mei, tandis que la voix de la démone sortait d'entre les lèvres d'un ton monocorde.

Mei avait plus de réflexes et de réactivité que Darcy, c'était certain. C'était d'ailleurs ce qui la rendait manipulable. Dommage pour toi, petite. La manipulation, c'était justement le terrain de prédilection de l'hybride, que ce soit sur le ring ou ailleurs. Tes feintes n'y feront rien tant que tu ne saura voir qu'un coup à l'avance.


[HRP : Bon, je sais, j'ai fait agir ton personnage sans t'en faire part. Pour le coup, c'est ce qui m'a paru le plus probable. Si ça te plaît pas, je suis libre à toi de me le signaler par mp. On peut toujours en discuter et j'éditerai ça en conséquence.]

Elle m'a eu. Je l'ai sous-estimée, et elle m'a eu.
En lui portant une frappe du coude, je l'avais forcée à exposer ses cotes. Je pensais porter un coup sur cette zone, mais comme la fois d'avant, un amas biologique explosa de son flanc et bloqua mon attaque. Ma réaction de surprise signa ma perte : la main de la fille, ou plutôt du monstre, m'attrapa à la gorge pour me soulever du sol. La pression sur ma gorge m'empechait de respirer ou déglutir, sans parler de mes carotides pressées, empêchant le sang d'iriguer convenablement mon cerveau. La chose me délivra son petit speech dégoulinant de condescendance, que je compris à moitié en raison du bourdonnement dans mes oreilles dû à sa poigne. Je tentais d'ailleurs de la briser, mais en force pure, elle me battait haut la main.

Finalement, elle me jeta au sol, ce qui me coupa le souffle. Cette fois, j'étais KO pour de bon. Le choc à l'arrière de mon crâne me causait une vive douleur, et je savais que si j'essayais de me lever, je serais alors prise de vertiges. J'avais perdu.
Pour autant, l'idée qu'elle s'en tire ainsi me dégoutait. Je voulais lui faire ravaler sa suffisance, qu'elle comprenne que sa supériorité n'était pas absolue. Dans un dernier élan de fierté, je tente une technique de combat au sol. Du talon droit, je vise son pied droit, pendant que mon pied gauche part lui faucher son genou. Objectif : lui faire perdre l'équilibre et la forcer à s'abaisser, pour lui porter un coup de pied au visage.