Le faux Inari ne tenta même pas de rattraper la gorgone. De toute façon, Darcy n’avait plus rien à apprendre de Médusa depuis son passage à l’infirmerie. Lorsqu’elle se retrouva seule sous la table, la copie de Kawai-chan reprit la forme de la froide et stoïque semi-démone. Elle resta ici un moment, seule dans sa fausse robe, la vraie étant toujours dans un placard, recroquevillée sous la table, à réfléchir sur la situation. Au fond, qu’espérait-elle lui dire à cette chimère ? Qu’elle était désolée ? Peu de chances, puisqu’elle ne l’était pas. Alors quoi ? La prévenir de ce que lui avait révélé Anselm sur leur soi-disant relation ? Là encore, difficile à imaginer, puisqu’elle était désormais le bras droit du professeur.
Que voulait-elle alors ? Honnêtement, Darcy n’était pas certaine de le savoir elle-même. Elle avait suggéré à son nouveau chef de ne pas rompre tout contact avec Faith, prétextant que la mettre sous une sorte d’angoisse constante de tomber sur Darek ou un de ses formes pourrait la rendre plus vulnérable, et la pousser ainsi à reposer davantage sur Anselm, devenant ainsi plus facilement dépendante de lui. Seulement, elle n’était pas non plus convaincue que c’était la raison qui l’avait poussée à ne pas rester éloigner de Faith.

Alors quoi ? Alors rien. Elle ne savait pas quoi faire, si elle devait chercher un moyen de lutter contre Anselm ou lui faciliter le travail, tenter de prévenir Faith ou la laisser à son triste sort. Oui, car au fond, elle avait un peu pitié d’elle, même s’il n’y avait aucune raison à cela. Car après tout, la compassion, ça se mérite non ? Et la chimère, elle avait fait quoi pour cela ? Rien, à part tenter de bouffer l’hybride pour avoir écrasé accidentellement un scarabée. Pourtant, malgré cela, Darcy restait plutôt neutre face à toute cette histoire. Il fallait croire qu’elle était devenue incapable de se mettre en colère. Eh bah, on dirait que son cœur s’était bel et bien éteint cette fois, si elle n’était même plus capable d’avoir la moindre rancœur envers les gens qui essayaient de la tuer…

« J’aurai peut-être du la tuer finalement… » soupira l’hybride.

C’est sûr que si elle avait achevé la chimère lorsqu’elle en avait eu l’occasion, la situation aurait été bien plus simple. Faith ne serait ni allée pleurer sur l’épaule d’Anselm, ni lui souffler le nom de Darek Lysen. Le professeur ne serait pas aller faire sa petite vendetta personnelle pour défendre sa propriété, et Darcy aurait été tranquille. Bon, certes, ça lui changeait un peu, mais tout de même… Braquer des banques, prendre la place des personnes haut placées, briser Faith et éventuellement d’autres personnes. Voilà, c’était le programme d’Anselm. Mais cela, au fond, elle l’avait déjà fait, et avait même eu le temps de s’en lasser. M’enfin, au moins il y avait une personne qui lui portait un peu de considération en ce monde. Et si Darcy ne voudrait jamais l’admettre, d’autant qu’elle est vue comme un outil pratique et non comme une personne respectable, au fond cela lui faisait un peu de bien.
Bah, au lieu de se torturer l’esprit ainsi à savoir ce qu’elle voulait vraiment, elle n’aurait qu’à faire comme d’habitude : laisser le temps faire son œuvre. Tôt ou tard, le regard des gens changerait, Anselm se lasserait d’elle et la jetterai, ou alors elle se lasserait de lui servir d’outil et disparaitrait sans laisser la moindre trace comme elle savait si bien le faire. De toute façon, si elle le voulait vraiment, l’hybride serait déjà en mesure de se débarrasser de lui, ayant déjà trouvé de multiples façons de se protéger des yeux du démon.

La semi-démone sortit donc finalement de sous le buffet, non moins sans difficulté que la dernière fois. Lorsque l’on mesure 1m65, on a un peu plus de mal à tenir sous une table et à en sortir que lorsque l’on fait 1m37 à peine grâce à l’apparence d’Inari. D’ailleurs, où était-il passé celui-ci ? N’avait-il pas prévu de retourner discuter avec Faith ? Bof, tant pis, allons nous reposter en observateur dans les escaliers, ça fera passer le temps avant de trouver une autre occupation.
Ne prêtant guère attention aux personnes qui l’entouraient, Darcy se dirigea tranquillement vers les escaliers, bousculant au passage ce petit vampire binoclard sans réellement s’inquiéter de son cas.

~~~

Wow, wow, wow ! Mais c’est qu’on dirait que Keiji-kun s’intègre à merveille on dirait ! Tant mieux pour lui, ça fait plaisir de voir qu’il se faisait déjà de nouvelles connaissances. Surtout qu’en plus, cela permettrait à Inari de les connaître à son tour ! Après tout, les fêtes étaient là pour ça non ? Faire de nouvelles rencontres, se faire de nouveaux amis en créant de nouveaux liens, renforcer ceux qui étaient déjà existants, le out dans la joie et la bonne humeur. C’est ça, l’esprit de noël.
D’abord, cette fille fan de cosplay qui avait abordé le petit Père Noël. Bon, elle ne semblait pas avoir remarqué qu’elle avait également un lutin juste à ses côtés, mais ce n’était pas grave, Kawai-chan n’était pas du genre à s’arrêter sur ce genre de détail. Il ne comptait plus le nombre de fois où on ne l voyait pas tout de suite en raison de sa taille. Et puis, on ne remarque pas toujours tout le monde dans la foule.

« Oh, kawai ! » s’écria-t-il en ouvrant grand ses yeux noisette.

Il fallait dire que c’était vraiment mignon comme tenue, avec tous ces pompons, ça lui allait drôlement bien en tout cas. Le petit lutin de noël s’apprêtait d’ailleurs à lui faire d’autres remarques, quand soudain une autre personne, visiblement une connaissance de Keiji, arriva et le salua. Inari fut fort surpris de constater qu’une élève à Mahora était au moins aussi petite que lui qui, d’habitude, était le moins grand de son école. Alala, mais c’est qu’il semblait être aux anges en la voyant ce petit, il avait l’occasion de se faire une nouvelle amie qui, au vu du fait qu’elle avait l’air d’apprécier Keiji, aurait sans doute des passions et passe-temps communs avec eux.
Kawai-chan jeta un regard intrigué à son ami, attendant qu’il le présente à sa connaissance. Non pas qu’il ne voulait pas le faire de lui-même, loin de là, il n’était pas du genre à snober les gens ainsi. En vérité, c’était juste qu’il ne tenait pas vraiment à s’imposer en s’immisçant dans la conversation. Il se contentait donc de les regarder discuter en silence, en agitant légèrement ses oreilles pointues de temps à autre. Comment faisait-il ça ? Allez savoir ! C’est comme pour la hotte mystérieuse dont il sortait des objets plus grands que le sac, on ne le saura probablement jamais.

« - Oh. Matte. »

Sans même prendre la peine de répondre, Médusa regarda Satsuki aller vers les deux bols, les goûtant tous les deux l'un après l'autre en petite qualité. Après cela, la cuisinière revenait vers elle, indiquant celui qui était à gauche. C'était, d'après les dires de Satsuki, celui qui n'avait pas d'alcool. Médusa fixa un instant ce bol. Oui, celui-là, car si elle avait posé cette question, c'était pour ne pas se tromper. Elle et l'alcool, ça fait plus de deux. Bref, après quelques secondes, elle se retourna vers Satsuki en inclinant légèrement la tête sur le côté.

- ... Arigatô.

Après ce simple mot, prononcé sur un ton sans émotion, la jeune fille s'apprêta à partir, mais fut coupée par une question. Oui, Satsuki voulait savoir si elle allait bien. Comme d'habitude, Médusa ne voyait pas vraiment l'intérêt de poser voir même de répondre à ce genre de question, sachant que lorsque quelqu'un va bien, c'est plutôt visible, mais bon ... Il semblerait que certaines personnes trouve ce genre de manière polies ... Même si c'est souvent très indiscret, nee ?

Elle s'arrêta, laissant son pied en suspension un peu au dessus du sol.

- Hai, ore-sama va bien.

Elle déposa son pied par terre, puis s'éloigna, sans même courir pour une fois. Oui, courir, parce que quand on est "si parfait qu'elle", notre horaire est chargé, pas de temps à perdre en marchant lentement. Cependant, aujourd'hui, elle se l'était permise. Pourquoi ? Qu'est-ce que je suis supposée en savoir moi ... ? C'est elle qui est étrange, et elle l'est pas juste à vos yeux. Une fois devant le buffet, Sa Divine Personne se servit un verre de punch non alcoolisé qu'elle s'était mise à boire en retournant s'asseoir dans un coin. De préférence, loin des autres, de manière à ne pas se faire aborder par des élèves de l'école. Oui, parce que pour elle, c'est pas mal ennuyant.

Le coeur de Faith palpitait dans sa poitrine. Ça faisait mal. Très mal même. Elle se glissait discrètement entre la foule d'élèves bavards, sans en frôler un seul. De son chignon défait s'échappaient plusieurs mèches de cheveux d'un brun très pâle qui retombaient sur sa nuque ; sur ses épaules frêles. Pourquoi se sauvait-elle, déjà ? De quoi avait elle si peur ? Darek ? Mais... Pourquoi ? Il avait beau lui avoir dit toutes ces choses terribles, mais pourtant, elle étaient vraies, non ? En quoi ça lui faisait peur ? Au milieu de la pièce, la chimère s'était arrêtée. Son regard se fit soudainement extrêmement fatigué. Il s'attarda sur le sol. Plus aucune trace de peur. Juste... Les faits qui venaient de lui sauter au visage. La vérité l'effraie. Oui, elle a peur de la réalité. Peur de se retrouver seule, peur d'être abandonnée. Cet individu n'y était pour rien. Elle le fuyait pour rien. Il n'avait dit que la vérité, rien que la vérité. Pourtant, elle le savait depuis le début. Qu'est-ce qui avait remit ça en doute ? Pourquoi est-ce qu'elle fuyait cette réalité si évidente ? C'était comme ça depuis qu'elle avait été créée. Elle n'a jamais été aimée. Pourquoi est-ce que ça la choquait tant, tout d'un ? Ça a TOUJOURS été comme ça ! Ça n'avait jamais changé. Alors pourquoi ... ?

Seulement, quelque chose la frappa subitement. Ses yeux s'agrandirent, toujours fixés sur le sol.

« Darek Lysen... Ça sonne plutôt bien, sur une tombe ce sera du plus bel effet^^. »

« Du coup, il y a quelques jours, je me suis fait agresser par un fou furieux parce que mon imbécile de frère a eu la bonne idée de s’attaquer à sa petite amie. »

Anselm... Il avait trouvé Darek ? Il y a quelques jours, en plus ? C'est pas vrai... La tête de la créature se releva tout d'un coup, son regard paniqué parcourant la pièce à la recherche de quelque chose. Ou de quelqu'un... Darcy. Voilà, trouvé. Elle se dirigeait vers les marches, bousculant quelques personnes sur son chemin. Elle avait repris son apparence de tout à l'heure. Celle du rotenburo. Pourquoi est-ce qu'elle était encore vivante ? Pourquoi ? Il était arrivé quelque chose à Anselm ? Ou bien il s'était passé quelque chose tout court ? Ou bien... Pire... Va savoir. Pétrifiée sur place, Faith fixait Darcy. Elle devait bien savoir... Mais la brunette n'était pas pour se ruer dessus comme un chacal en lui demandant pourquoi elle n'était pas mort. Il s'était probablement passé quelque chose et c'est ce qui inquiétait tant Fai. Elle craignait le pire, en fait, mais ne savait pas du tout à quoi s'attendre.

Elle prit une grande inspiration, tout en fermant les yeux, puis s'avança d'un pas rapide, cependant pas très déterminé, vers la jeune fille tant qu'elle avait encore le dos tourné. Elle avait beau avoir essayé de la tuer sous prétexte qu'elle avait marché sur son futur repas, mais qu'est-ce que vous voulez que je vous dise ? C'est ça, la vie. Les prédateurs se nourrissent de proies. Et ses proies à elle, ce sont des humains... Alors. Elle aurait beau s'excuser, mais c'est dans la nature des choses. Elle n'y peut rien. Et de toute façon, elle n'est pas désolée. Ça doit être la même chose du côté de Darcy. Cette dernière ne devait pas être désolée pour un sous de l'avoir réduite à néant en l'espace de quelques secondes. Elle avait du bien s'amuser, aussi. M'enfin... Faith avait déjà rattrapée la semi-démone par derrière, lui tapant légèrement dans le dos pour signaler sa présence. Oui, elle a touché quelqu'un sans avoir envie de vomir ; elle a touché quelqu'un sans avoir l'intention de lui faire du mal. Étrange.

« Qu'est-ce qui s'est passé ? ... »

Huh ? Whut ? ... C'était quoi ce regard désespéré tout à coup ? Mouais, bref. Elle avait probablement pas à lui dire de quoi elle parlait... Probablement qu'elle le devinerait toute seule en lisant dans ses pensés... Et elle remarquerait sans doute aussi à quel point elle était paniquée. M'enfin, Faith était loin de faire preuve d'agressivité envers elle ou quoi que se soit dans le genre. Elle voulait juste savoir... Et puis, elle sait pas elle, si jamais elle a peur qu'Anselm vienne au bal ou quelque chose du genre, ils avaient qu'à aller ailleurs et elle pouvait se transformer en quelqu'un d'autre, si ça lui chante.

Du haut de son observatoire qu’elle venait de rejoindre, accoudée à la rampe, Darcy finit enfin par repérer Faith. Si ce n’était pas malheureux de voir un tel spectacle. Le soi-disant prédateur, fuyant lâchement sa proie au milieu d’une foule qu’il n’osait même pas toucher. Pathétique.
Une minute, si elle fuyait, pourquoi se dirigeait-elle vers les escaliers ? Pourtant il était clairement visible que Darcy s’y trouvait. A moins que... Tiens donc, voilà que Faith avait l’intention de venir discuter avec l’hybride ! Le serpent venait donc voir l’oiseau jusque sur son perchoir ? Courage ou folie ? Allez savoir ! A bien y penser, la situation de ces derniers temps, à savoir l’attaque puis la déchéance de Faith, et maintenant le fait qu’elle semble revenir à la charge, évoquait à Darcy une petite comptine qu’elle ne pu s’empêcher de fredonner d’un air morne.

« La petite araignée grimpait sur le tuyau.
La pluie qui tombait l’emporta au fil de l’eau.
Le soleil est venu, toute la pluie il a séchée
Et la petite araignée, sur le tuyau, est remontée… »

Ben quoi ? Que voulez-vous ? Lorsqu’on a vécu plusieurs siècles dans le monde humain, à tout tester pour faire passer l’ennui, y compris travailler dans un hôpital psychiatrique, on n’en ressort pas totalement équilibré, et l’on peut parfois sembler un peu bizarre. Même si, honnêtement, Darcy s’estimait bien plus saine d’esprit que nombre de cas présents à Mahora.
La semi-démone ne regarda pas Faith grimper les quelques marches qui les séparaient. De toute façon, elle n’avait rien à craindre d’une quelconque attaque de la part de la chimère, pas devant tout ce monde. La jeune fille s’était donc contentée de regarder la foule, comme si de rien n’était, lorsque Faith lui tapota sur l’épaule. C’est à cet instant là que Darcy daigna lui accorder un regard.

« Qu'est-ce qui s'est passé ? ... »

Ben voilà, bravo Faith, t’as réussi à la faire se sentir coupable rien qu’avec ton regard. Oh, c’était léger, et elle le cachait bien, mais c’était suffisant pour lui donner envie de tout t’avouer. De plus, au fond, si elle t’avait épargné à la forêt, c’est parce qu’elle n’aime guère avoir des morts sur ce qui lui reste de conscience. Et avec la façon dont tu as été fragilisée en forêt, et ce que te réserve Anselm, si on ne te met pas en garde, tu risques fort de faire une énorme bêtise, bêtise qui rajouterait une victime sur le CV de l’hybride.
Darcy prit donc une décision difficile, à savoir celle de se mettre en danger pour éviter le pire. Elle se retourna alors en direction de la foule, accoudée sur la rampe, regardant à côté d’elle, comme pour inviter Faith à en faire de même.

« Si on te pose des questions, tu as passé plusieurs minutes à essayer de me tirer les vers du nez. Après quoi j’ai fini par t’admettre que j’ai été forcée de prendre la fuite. Que tu sois inconsciente est une chose, mais que tu me mettes en danger en venant me parler dans de telles circonstances en est une autre. »

Moins clair, tu meurs. Mais c’était volontaire de la part de Darcy de ne pas être explicite dès le départ, elle faisait cela pour inciter la chimère à vouloir l’écouter jusqu’au bout. Et au vu du fait que cette dernière venait de s’accouder à ses côtés, c’était réussi. L’hybride poussa un profond soupir en portant son regard sur la foule en contrebas, ne sachant pas réellement par où commencer. Essayez donc de faire comprendre à une personne que vous avez traumatisée, après qu’elle ait essayé de vous tuer, que celui qu’elle aime n’est qu’une ordure qui joue avec ses sentiments. En tout cas, je vous souhaite bien du courage pour que l’on vous croie.

« J’ai deux mauvaises nouvelles pour toi, commença-t-elle finalement, la première c’est qu’Anselm va très bien, peut-être même un peu trop. La seconde, c’est qu’il a fait de moi son bras droit. »

Bon, voilà, la bombe était lâchée maintenant, trop tard pour ne pas donner plus de détails. Mais avant de continuer sur sa lancée, Darcy jeta un bref regard en biais à la chimère, afin de voir comment elle réagissait à la nouvelle. Disons que « effarée » aurait pu correspondre. Mais allez savoir si elle y croyait réellement ou non.

« Comme tu t’en doutes de sa part, il ne m’a pas vraiment laissé le choix. Et si je suis en mesure de lui désobéir en te parlant de ça c’est parce que… disons que ses yeux n’ont pas exactement le même effet sur moi que sur les autres. »

Des mauvais souvenirs remontèrent à la surface dans l’esprit de Darcy. Cette douleur, ce terrible châtiment qu’Anselm lui avait infligé d’un simple regard, cette même punition qui l’attendait si jamais l’hybride tentait de doubler le professeur, comme elle était plus ou moins en train de le faire d’ailleurs. Mais bon, il n’y avait aucun risque que le professeur démoniaque n’apprenne les détails de cette conversation. S’il avait des yeux et des oreilles partout, Darcy, elle, était passée pro pour ce qui était de cacher ses intentions et neutraliser les moyens des autres. Oh, bien sûr, elle n’avait pas protégé la pièce toute seule, elle avait eu un coup de main. Cependant, l’identité de cette personne ne sera pas révélée, pas pour l’instant en tout cas, elle est bien trop utile pour que la semi-démone ne prenne le risque qu’elle soit découverte.

« De façon plus détaillée, continua l’hybride, j’ai tenté de le déstabiliser comme je l’ai fait avec toi. Seulement, j’ai eu beau sortir le grand jeu en prenant ton apparence, il n’a pas été attendri le moins du monde. Bien au contraire, cela l’a plus amusé qu’autre chose de te balancer son regard en pleine face. Et alors que j’étais incapable de faire quoi que ce soit pour me défendre… »

Darcy hésita à dire la suite, les yeux baissé vers la rampe sur laquelle elle s’appuyait. Son souci n’était pas réellement de ménager ou non la chimère. Non, le problème, c’était surtout qu’elle puisse y croire. Remarque, qu’elle fasse confiance à sa version ou non, ça ne changeait rien au final. L’essentiel, c’était qu’elle soit prévenue, que lorsque ça arriverait, elle puisse se dire qu’on l’avait avertie, afin que le choc ne soit pas trop rude, mais juste assez pour qu’elle le supporte.

« … Il m’a avoué qu’il ne t’aimait pas, se lança-t-elle, et qu’il comptait se débarrasser de toi après s’être amusé. Je sais que c’est dur à croire, mais c’est la vérité, il était sincère lorsqu’il me l’a dit, j’ai pu lire dans son esprit après cela. Il a même tenté de me réduire au silence par un ordre, mais là encore tout ne s’est pas déroulé comme prévu. C’est bien ce seul détail qui me permet de lui désobéir en te parlant de cela aujourd’hui. »

Se doutant bien que Faith ne la croirait pas, Darcy s’empressait de lui en dire le plus possible, avant qu’elle ne s’irrite de ce qu’elle devait considérer comme des mensonges et ne s’en aille. Après tout, il fallait qu’elle sache, sinon elle ne supporterait pas le choc de la rupture et risquait de commettre l’irréparable. Et cela, elle le réalisait maintenant, Darcy s’en voudrait toujours. Pourquoi ? Parce qu’au fond, elles étaient pareilles : deux êtres qui n’auraient sans doute jamais dû voir le jour, qui n’avaient pas leur place en ce monde, et dont les autres voulaient profiter simplement pour se divertir ou par intérêt.

« Je lui ai même… raconté ce qu’il s’était passé dans la forêt. Il se pourrait bien qu’il décide de rompre avec toi en employant les mêmes mots que je ne l’ai fait pour te briser là-bas. Je n’en suis pas très fière, je te dis juste cela pour t’avertir. Je sais que c’est dur à croire, que c’est tiré par les cheveux. Mais le fait que je sois vivante et à peu près libre de mes mouvements, sans pour autant que Anselm ne soit hors d’état de nuire, montre bien que la situation n’est pas simple, non ? »

L’hybride prit une profonde inspiration dans le but de dissiper la nervosité grimpante en elle, bien que peu visible malgré tout. Si Anselm arrivait, il valait mieux pour elle qu’elle ait l’air totalement calme, sinon il se douterait de quelque chose et cela pourrait mal finir. Une fois plus apaisée, elle reprit la parole sans laisser le temps à Faith de réagir.

« Je ne te demande pas de me croire, pas tout de suite en tout cas, juste de rester un minimum sur tes gardes et de repenser à tout ceci lorsqu’il voudra se débarrasser de toi. Tu ferais bien d’y aller par contre, Anselm ne devrait pas tarder et je lui ai dit que je serais postée à un endroit où je serais facilement repérable. Et n’oublie pas, tu ne connais pas cette version des faits. Tu m’as juste vue, tu t’es inquiétée, tu m’as tenu la grappe pendant plusieurs minutes, et j’ai fini par te dire que j’ai prit la fuite. »

Sur ces mots, elle se remit à regarder la foule d’un air morne, comme s’il ne s’était absolument rien passé, et cessa de prêter la moindre attention à la chimère, en tout cas pour l’instant. Une fois que cette dernière serait redescendue, Darcy se remettrait à jeter des regards dans sa direction de temps à autres, histoire de ne pas changer ses habitudes. Après tout, aux yeux d’Anselm, l’hybride n’avait aucune raison d’éviter Faith du regard.

Satsuki Yotsuba a écrit:

Pendant ce temps, un garçon poireautait. Une fille qui fait attendre un garçon, traditionnellement, ce n'est pas si nouveau, n'est-ce pas? Cela n'empêchait qu'ils avaient, tous les deux, tellement eu le mauvais oeil d'un point de vue de couple ces derniers temps, que Tamao commençait presque à perdre espoir de voir Misaki arriver. Il avait mal au ventre, se sentait nerveux, avait peur soudain, voulait partir, puis revenait sur ses pas pour se remettre à tourner en rond non loin de l'entrée du bal —à l'intérieur quand même, dehors il faisait froid.

*Oh non, tout de même... Si je la rate, ce sera trop bête... Mais en même temps... Peut-être qu'elle n'a pas reçu mon message... Peut-être qu'elle l'a reçu mais qu'elle l'a ignoré... Peut-être qu'elle est en colère encore... Après tout, j'ai oublié son anniversaire... À la guerre comme à la guerre, c'est normal qu'elle m'évite.*

Ha ha... Ha.

Il avait tenté de rire de lui-même, mais ça aussi, ça sonnait complètement faux. Désemparé, il se retrouva à parler tout seul... Comme ça lui arrivait de temps en temps. Au risque de se taper la honte, mais qui le regardait, qui s'intéressait à lui, après tout, hein?

Bon sang! De qui je me moque? Bien sûr que j'ai envie d'être avec elle! Ça me manque de pas la voir! Misaki-chan... Quand est-ce que je pourrai m'excuser en bonne et due forme devant toi? J'ai pas envie de passer mon Noël tout seul, moi...

« ... Parce que tu crois que moi j'ai envie de passer Naël toute seule peut-être ? Baka. »

Alors que ces mots se faisaient entendre derrière Tamao, une petite main vint frapper affectueusement la tête de la petite taupe à Lunettes. Elle avait bien dit « Naël » ? Comme c'est cute, cette expression elle l'avait entendue près de l'arbre-monde quelques jours plus tôt. Son sourire sur le visage, Misaki se trouvait derrière Tamao, les mains dans les poches et la moitiée de sa petite tête fourgé dans une énorme écharpe blanche à ponpons. Eh oui, elle avait froid, elle ! Un long manteau blanc & des bottes plates blanche. C'est ainsi que la petite compter passer toute sa soirée ? Non, ce n'était que pour l'extèrieur, ça. Ses cheveux étaient détachés, une pince blanche en forme de gros noeud papillon tout doux était dans ses cheveux, relevant quelques mèches lui cachant les yeux en temps normal. Un cadeau caché dans sa poche, elle attendait devant Tamao sans piper mot. A vrai dire, elle attendait peut-être qu'il dise quelque chose ? Ah bah là, elle en avait pour toute la soirée si elle ne disait rien ! Elle se sortit maladroitement le cadeau, manquant de le faire glisser à plusieurs reprises à cause de ses gros gants couvrant ses mains blanche. Et le cadeau ? C'était quoi, au juste ? Bah bonne question. Même moi, j'en sais encore rien. En fait, tout en composant le message, je cherche. Alors on va passer à la suite jusqu'a ce que je trouve, m'kay ?

« ... Joyeux Naël, n'amour ... »

ANH ! « N'amour », surnom trop cute SPOTTED, quoi ! Tendant le cadeau de ses deux mains vers Tamao, Misaki cacha son visage dans son écharpe. Elle avait un peu honte d'avoir utiliser un tel surnom. Peut-être parce qu'elle savait pertinnement que Tamao allait être gêné pendant un moment à cause de ça ? Raah, qu'elle idiote parfois, cette coquine ! NON, pas dans le sens Hentaï, Baka Hentaï ! --' Et le cadeau alors ? Parlons de l'emballage parce que là, j'ai toujours pas trouver. Euh'w, l'emballage est bleu avec un énorme ruban rouge flashi et une enveloppe contenant un mot était relié au paquet. Ah ça y est, j'ai trouvée le cadeau ~.

« Euh ... En fait, j'ai pas trouvé mieux et c'était vraiment quelque chose que j'ai fais à la dernière minute. Je sais qu'une écharpe tricoté par moi ça fait vraiment quiche mais j'avais pas d'autres idées. Et puis ... Euh ... Enfin, voilà quoi ... Pardon ... Et encore une fois, Joyeux Noël »

Eh ouais; une écharpe ! Une grosse et bonne écharpe bien chaude tout en laine et toute verte ! ... Hein ? Comme ça, y'a quoi sur le mot ? Bah rien du tout ! En quoi ça vous regarde, d'abord ?! BON J'AVOUE, ça m'intrigue aussi ...

« Dear Tamao-chan,

Joyeux Noël et bonnes fêtes. En esperant que le cadeau maladroit et bête que je t'ai concocter te plaise un peu ... Je t'aime et ... voilà, quoi.

With my love, quand même ... »

Eh bien voilà ce qu'il dit, le mot ...

Démolie. Totalement démolie. Un moment, elle aurait presque cru que c'était un cauchemar. Elle avait envie de crier jusqu'à ce qu'elle se réveille. Mais ce n'était pas un rêve. C'était la réalité. Est-ce que Darcy mentait ? Va savoir. Pourtant, il disait la vérité à la forêt. C'est juste que Faith était beaucoup trop orgueilleuse pour s'en rendre compte... Et elle est toujours aussi orgueilleuse qu'avant, en fait. C'est quelque chose qui ne changera jamais. Pendant que Darcy lui disait tout ça, la chimère n'avait pas prononcé un seul mot. Jamais elle ne coupe la parole de ceux qui lui explique quelque chose. Une de ses rares qualités, d'ailleurs. M'enfin. Elle avait trop de choses en tête pour répondre quoi que se soit, lorsqu'elle termina. La brunette se contenta de tourner la tête, lançant un regard inexpressif à l'attroupement en contre-bas. Décidément, démolie était vraiment le mot à employer dans le cas présent. Elle n'avait même pas le coeur de bouger de là, de gifler Darcy, que sais-je. Quelque chose qu'une fille normale qui se sent trompée et abandonnée par son « petit copain » ferait, quoi. Donc, pour faire simple, Anselm avait trouvé mieux qu'elle ? ... Pas étonnant. Fai n'a rien de bien spécial, pour faire simple, alors que la fille assise à côté d'elle est belle, intelligente... Elle est calme et à des capacités bien plus intéressantes. Si elle n'était pas aussi troublée en ce moment, probablement que la petite aurait été jalouse.

Faith replia doucement ses jambes sur elle, passant ses bras autours de ses cuisses et appuyant son menton sur ses genoux. Toujours aucun mot. Aucun son. Rien. Juste un regard dans le vide, incroyablement fixe. Après quelques secondes, elle secoua vivement la tête. Elle n'avait quand même pas envie que Darcy soit de nouveau un peu trop curieuse et qu'elle fouille dans sa tête, hein. Elle laissa échapper un rire nerveux, puis son corps se remit à trembler. Encore et encore. Et pas qu'un petit tremblement de rien du tout. Ça trahissait complètement tout ce à quoi elle était en train de penser en ce moment. Euh... Darcy lit dans les pensés... Idiote... Et la voilà qui riait de nouveau à cette pensée, enfouissant son visage dans ses mains. Elle était pathétique... Pathétique. Elle allait être abandonnée à nouveau... Elle avait juste envie de se tuer pour ne pas revivre ça, pour ne pas voir le sourire de requin d'Anselm satisfait. De toute façon, elle l'aurait probablement fait après si Darcy ne l'avait pas prévenue avant. Pourquoi est-ce qu'elle avait fait ça, d'ailleurs ? Faith avait bien essayé de la manger... Elle était ridicule. Tout simplement. Et la voilà qui agonisait silencieusement, tremblant comme une feuille aux côté d'une personne qui la déteste et qu'elle a déjà tenté de tuer. Super.

« Tsh ! »

Ce fut tout ce que Darcy accorda à Faith pour l’instant. Pas même un regard, encore moins des paroles consolatrices ou compatissantes. Car ce n’était pas dans sa nature de se soucier des autres. La seule chose qui importait à l’hybride au fond, c’étaient ses propres états d’âme, ni plus ni moins. Oh, bien sûr, elle aurait pu faire un effort, mais elle n’avait aucune raison d’en faire. Tout d’abord, Faith avait tenté de la tuer avant de lui envoyer son petit copain la torturer. Ensuite, elle avait déjà fait assez d’effort en prenant le risque de la prévenir. Enfin, la brunette l’agaçait de par son comportement. Car oui, c’était bel et bien de l’agacement qui était exprimé par ce « Tsh ! ».

Mais qu’est-ce qui l’exaspérait au juste chez Faith ? Le fait qu’elle pleure ? Certainement pas. Après tout, Darcy avait beaucoup pleuré aussi lorsque son univers s’était effondré. Qu’elle se trouve pathétique ? Là encore, l’hybride pouvait comprendre. Avec sa personnalité et les épreuves qu’elle avait subies au cours de sa vie, que ce soit récemment ou non, il y avait de quoi penser cela. Non, rien de toutes ces choses n’irritait Darcy. Ce qui l’énervait en réalité, c’était la faiblesse d’esprit de Faith, et ce qu’elle envisageait sans doute de faire en ce moment même. La semi-démone n’avait pas eu besoin de lire dans les pensées de la chimère pour le comprendre, il n’y avait qu’à la regarder pour se douter de ce qui trottait dans sa tête de reptile.

« Si tu songes à en finir, alors tu es encore plus minable que tu ne l’imagines. » lança-t-elle d’un ton glacial.

Cette fois-ci, Darcy s’était enfin décidée à regarder Faith. C’était un regard glacial, effet renforcé par la couleur de ses yeux – rappelant la surface froide de l’acier – rempli d’un mélange de dégoût et de mépris, pas de quoi remonter le moral de la chimère donc. Ni d’améliorer son estime d’elle-même.

« Si tu t’écœures telle que tu es, alors change, ou du moins essaye. Ce sera déjà moins pathétique que de se foutre en l’air pour un raté qui a besoin de soumettre des êtres impurs afin de se sentir puissant ou respecté. »

Ne supportant la vue du triste spectacle que la chimère lui offrait, Darcy reporta son regard sur la foule avant de continuer.

« Ne te fais pas d’idées, je ne t’ai pas pardonnée, je ne t’apprécie pas, et je ne parle même pas du peu d’estime que je te porte. Seulement j’en ai encore moins pour cette ordure, et l’idée même qu’une fille se montre stupide au point de mourir de son plein gré pour lui, c’est une chose qui me donne envie de vomir. Et la Faith que j’ai sondée dans la forêt, celle qui avait encore un minimum de fierté et de caractère, serait également répugnée de voir à quel point elle allait devenir faible et lâche. »

Bon, ça, c’est fait. Ceci étant dit, il restait encore à la faire déguerpir de là vite fait. Parce que non seulement la présence de cette Emo-Faith l’irritait au plus haut point, mais aussi plus le temps passait et plus Anselm risquait d’arriver. Qu’il surprenne Darcy avec la chimère, c’était une chose, mais que Faith soit en larme juste à côté d’elle à ce moment là en était une autre. Le professeur se douterait certainement de quelque chose, et il deviendrait difficile de trouver une explication le convainquant.

« Maintenant dégage, ordonna la jeune fille, sort de la pièce, retourne sous ta table si ça t’amuse, mais va pleurer ailleurs. Que ta vie n’ait plus d’importance à tes yeux n’est pas mon problème, mais ait au moins le bon goût de ne pas mettre la mienne en danger une troisième fois. »

[Eh ! XD Elle pleure pas heiiin ! Relis !! ]

Encore une fois, Faith s'était contentée d'écouter sans rien dire. Comment avait-elle réagit à un discours aussi dur ? À vrai dire, elle avait eu une réaction aussi inattendue que d'habitude. Elle avait éclaté de rire, mais d'un de ces rires... Un rire de psychopathes, terrifiant. À quoi s'attendre de plus d'elle ? Elle est complètement cinglée, après tout. Après un tel choc, ça ne pouvait qu'être pire. La brunette releva donc sa tête ébouriffée, un sourire de maniaque accroché à ses lèvres. Ses yeux étaient rougis, mais toujours aussi secs. La chimère se retourna vers Darcy, plongeant son regard ambre un peu trop amusé dans les yeux acier de la jeune fille. La langue de la lézarde claqua, puis elle émit un sifflement semblable à celui des serpents, penchant légèrement la tête sur le côté. Elle n'était pas moins blessée qu'avant, ce qu'elle avait appris sur Anselm était loin d'être encore digéré, mais le ridicule de la situation la faisait beaucoup trop rire pour l'instant.

« Se faire faire la morale par quelqu'un qu'on a déjà essayé de manger... C'est beaucoup trop drôle pour être prit au sérieux ! »

Bah quoi, c'est totalement vrai. Imaginez vos pommes de terre vous faire la morale ! C'est d'un ridicule ! Beaucoup trop marrant, même. Ce morceaux de steak aux jambes trois fois trop longues était vraiment quelqu'un d'étrange. Ouais, un peu trop, même. La juger alors que ça ne la regarde en aucun cas, c'est idiot. Et puis, en quoi ça changerait la vie de la créature, d'être pardonnée par cette pouffiasse ? Hello ! À chaque être vivant son propre régime ! Elle n'a aucunement besoin de se faire pardonner pour simplement respecter sa place dans la chaîne alimentaire. En aucun cas elle ne se sentait coupable. Peut-être même qu'elle se serait tuée en mangeant du gibier aussi avarié... M'enfin. C'est le moindre de ses soucis, en ce moment. Inutile de revenir sur le passé. Oh, ce qui est hilarant, aussi, c'est de juste penser que le fait que Darcy ne l'apprécie pas est censé changer quelque chose à sa vie. Croyez-vous vraiment qu'un oiseau se soucis du point de vue qu'un vulgaire verre de terre lui porte ? Oh ! C'est vrai ! Le meilleur reste encore à venir ! « Mourir pour lui », avait-elle dit. Rohh, elle était bien loin de la vérité, celle-là. C'est pas comme si elle allait mourir pour lui, mais bien À CAUSE de lui.

« Tu t'imagines vraiment que je vais le laisser vivre paisiblement en mettant fin à mes jours ? S'il y a quelque chose qu'il faut savoir, c'est que je suis très rancunière, et c'est complètement hors de question que je le laisse s'en tirer comme ça. »

La petite éloigna ses jambes de sa poitrine, les étendant devant elle. Sa tête était toujours penchée sur le côté, de nombreuses mèches de cheveux recouvrant encore ses yeux. Elle ne put s'empêcher de rire un peu à nouveau, posant son index sur ses lèvres.

« Oh, il va souffrir. Croit-moi. Et pas qu'un peu. »

Et hop. C'est vrai qu'elle était démolie, qu'elle aurait envie de se tuer sur le champ pour arrêter de souffrir. On a beau trouver ça lâche, le suicide, mais c'est pas comme si Faith avait vécu une vie heureuse jusqu'à là. Elle avait toujours été malheureuse. Pour une fois qu'elle avait un minimum de confiance en elle, qu'elle se sentait aimée, il fallait que ça lui soit enlevé. Décidément, elle est bien naïve, beaucoup trop, même. C'est pas à son avantage. En tout cas, elle s'en remettrait pas du jour au lendemain, ça c'est sûr. Et rien ne garantirais personne qu'elle ne se tuerait pas en fin de compte. Elle a trop souffert, elle en a juste marre. Trop, c'est trop. Un point c'est tout. Oh, et c'est pas comme si elle allait changer sur demande juste parce que Darcy lui demande. M'enfin.

« Ah, et puis... Non, je n'ai pas l'intention de dégager. Pour rien au monde je ne ferais plaisir à un vulgaire morceau de viande qui m'aurait probablement donné une indigestion. »

Ermmh... Je crois que c'est... Légèrement impossible de se rendre compte qu'elle lui en est quand même reconnaissante de l'avoir mise au courant pour Anselm. M'enfin. Beaucoup trop orgueilleuse pour l'admettre, la créature. Et puis, c'est pas comme si elle la considérait encore comme de la bouffe. Elle se contentait de la détester. Un point c'est tout. Et puis, Darcy disait ne pas vouloir mettre sa vie en danger une troisième fois ? C'est pas comme si la chimère avait eu une chance contre elle depuis le début. Et c'est pas non plus comme si elle n'était pas capable de se débarrasser d'Anselm elle-même, non ?

Eh bien, eh bien ! Mais c’est qu’elle reprenait un peu de poil de la bête cette petite ! D’une certaine façon, Darcy préférait cela. Une Faith en colère, c’est déjà moins suspect qu’une chimère en train de verser toutes ses larmes aux pieds de l’hybride. Visiblement, les remontrances avaient fait leur effet, pas celui escompté certes, mais c’était mieux que rien, non ?
Quoi qu’il en soit, les paroles de la chimère eurent le don d’arracher un léger rire à la semi-démone, qu’elle étouffa comme à son habitude. Il y avait longtemps que la bêtise humaine ne l’avait pas autant amusée. Non, sérieusement, Faith s’imaginait encore au dessus d’elle dans la chaîne alimentaire après sa défaite lors de l’incident de la forêt ? Si seulement elle savait que, cette fameuse chaîne alimentaire, Darcy n’en faisait tout simplement pas partie, au même titre que les démons sans bouche d’ailleurs. Ils n’avaient aucun prédateurs et aucune proies, ne se faisaient pas manger et ne mangeaient rien, en tout cas rien qui puisse être ingéré. Elle était tout juste un morceau de viande qui lui aurait refilé une indigestion ? Qu’elle essaye donc de survivre à la dite indigestion. Si la chimère avait la moindre idée de ce que contenait le sang de Darcy, elle n’oserait même pas ne serait-ce que la mordiller.
Comment l’hybride le savait ? Tout simplement parce qu’elle avait dû faire de nombreuses expériences sur son propre sang ces derniers jours. Sa défaite contre Anselm lui avait donné quelques petites idées pour améliorer son style de combat. Mais cela, c’est une autre histoire, revenons-en à la conversation.

Faith comptait donc s’attaquer au professeur ? On aurait pu la penser courageuse pour cela. Darcy, elle, préféra la qualifier d’inconsciente. Ce qui, en toute objectivité, semblait le plus proche de la réalité.

« Si tu penses avoir la moindre chance contre Anselm alors que tu as perdu contre "un vulgaire morceau de viande", tu es bien naïve. »

Eh oui ma grande, c’est comme ça, tu songes à t’attaquer à quelqu’un qui n’est pas du même niveau que toi, il faut t’y faire. Avoir des compétences de reptile, c’est une chose, mais lorsqu’on ne peut même pas approcher l’adversaire sans se prendre deux à trois balles dans les membres, ça ne sert pas à grand-chose.

« De plus, lorsqu’il saura que tu en as après sa vie, que penses-tu qu’il fera ? Qu’il t’affrontera dans un duel à la loyale ? Ou qu’il ordonnera à son bras droit de l’aider pour augmenter ses chances ? Si tu fonces têtes baissée ainsi, tu te retrouveras à deux contre une et n’aura même pas l’occasion de l’approcher à moins de deux mètres. »

Le regard de Darcy commença à s’éclairer alors qu’elle levait les yeux vers le plafond, un sourire détendu aux lèvres.

« La tournure que prend les choses est vraiment intéressante, lança-t-elle d’un air songeur, il semblerait que ce soit à l’esclave-repas que je suis de décider de qui va survivre ou non dans cette histoire. Tout dépendra de qui je déciderai d’aider. Dans le cas d’Anselm, je sais qu’il n’hésitera pas à me le demander, bien trop malin pour être orgueilleux. De plus, il semble décidé à me donner quelques tuyaux sur la façon d’utiliser mon don. Sans compter que je le trouve relativement divertissant… »

Soudain, les malicieux yeux acier de la jeune fille se posèrent sur Faith. Désormais, Darcy ne cachait même plus la satisfaction qu’elle avait à avoir la chimère à sa merci. Car même si cette dernière ne voudrait probablement jamais l’admettre, c’était pourtant la réalité. Sans l’hybride, Faith ne parviendrait probablement jamais à ses fins. C’est donc avec un large sourire que Darcy prononça les mots suivants :

« Mais toi, qu’est-ce que je gagne à t’aider ? »

Au fur et à mesure que Darcy parlait, on aurait pratiquement pu penser que Faith ne l'écoutait pas. En fait, elle semblait plutôt distraite, ou peut-être juste dans ses pensés. La situation était plutôt drôle, en fait, on aurait presque dit que la jeune fille assise à côté d'elle croyait que la chimère avait l'intention de tuer Anselm en combat singulier tout propre, quoé. En tout cas, elle n'en avait rien à foutre de s'en sortir vivante ou pas, tout ce qu'elle voulait, c'était de le voir souffrir. Même si elle l'aime. Oui, malgré la haine grandissante qui s'installait en elle, elle l'aime comme pas possible. Elle a l'impression qu'on est en train de la brûler de l'intérieur et que tout le monde la regarde mourir à petit feu. Tssk... Mouais, si elle pouvait juste réussir à mordre Anselm, il en serait probablement tordu de douleur. Et pas qu'un peu. Elle pourrait le laisser moisir là, jusqu'à ce qu'il aie la brillante idée de donner l'ordre au premier passant de lui aspirer le poison. Ça étonnerait franchement Faith que quelqu'un le fasse délibérement pour lui, alors bon.

La créature releva doucement la tête vers le plafond d'un air distrait, un grand sourire cruel toujours accroché à son visage. Elle appuya ses coudes sur ses cuisses, pour ensuite poser son menton dans ses mains. Ses yeux étaient toujours aussi rougis et c'était avec difficulté qu'elle retenait ses larmes, mais bon. Comme vous réagiriez, vous, si vous vous rendriez compte que la seule personne qui avait l'air de vous aimer en ce monde s'était servie de vous ? Mal, très mal. Inutile de le nier, duh.

« Naïve, hein ? ... Je ne l'ai jamais nié. Qu'est-ce que j'en ai à foutre ? Et puis, j'étais confiante lorsque je me suis attaquée à toi. D'où le fait d'avoir confiance en soit, c'est qu'un gros paquet de conneries. »

Elle marqua une pause, pivotant sa tête pour que sa joue se retrouve appuyée sur ses mains, et son visage tourné vers Darcy. Ouh là, elle se croyait très importante dans cette histoire, celle-là. On aurait presque pu appelle ça du grosbillisme chronique... Elle avait la grosse tête, celle là. Et probablement les yeux plus gros que le ventre. À ce moment là, Faith avait encore éclaté de rire bien malgré elle, lui jetant un regard pas vraiment expressif. Depuis sa confrontation avec elle, elle s'était beaucoup trop exprimée par le biais de ses yeux, et elle avait toujours détesté ça. C'est comme dire à des inconnus notre manière de penser. C'est idiot, m'enfin... C'est pas comme si ça changeait quelque chose de faire ça avec quelqu'un qui lit dans notre tête comme dans un livre ouvert, mais c'est une habitude que la brunette doit reprendre, pour son bien-être mental... Si elle en a un...

« Bah, c'est libre à toi. Soit tu restes au statut d'outil, soit tu reprends ta vie en mains. Et puis, j'vois pas trop ce que tu peux tirer de moi, si tu me détestes tant. »

La petite étira ses bras vers l'avant, relevant sa tête par la même occasion. Elle fit craquer ses doigts, ses épaules. Son regard se perdit à nouveau dans la foule grouillante de la salle de bal. Dire que la plupart d'entre eux se considèrent comme était malheureux... Ils n'ont rien vus, ils n'ont rien vécus. Elle s'attarda sur un couple, quelque part dans la pièce. Mouais, ils avaient l'air heureux... C'était pas ceux qui étaient venus l'autre fois, au cosplay café ? Sur le coup, une sensation de détresse avait envahie Fai, lui donnait soudainement envie d'éclater en sanglots. Elle n'en fit rien.

« Qu'est-ce que tu veux ? J'ai une vie entière à offrir, et elle s'annonce très longue. »

...Mouais, à ce point là. Et puis, les chimères on toujours eu une longue vie. Autant s'en servir pour foutre quelque chose d'intéressant. Darcy pouvait vraiment faire ce qu'elle voulait, jusqu'à la démolir si ça pouvait lui faire plaisir. Esclave, souffre-douleur, monnaie d'échange, pactio « avantageux »... Ah, en fait, pas trop sûre qu'elle a envie d'embrasser une fille. M'enfin... Elle n'en avait plus grand chose à foutre de ce qui adviendrait.

[Oui, double post'. J'suis pas sur le même ordi. XDD]

« Iiirk ! s'était écriée Hope avant de partir à la poursuite de son arme, recrachée par le rouquin et envoyée plus loin à l'aide du pied d'un inconnu. Mon savon ! O__O »

Quelques secondes plus tard, après avoir nettoyé son savon bénit de Dieu dans la salle de bain, elle revint tranquillement sur les lieux du crime : Là ou ce méchant roux, oui, méchant, avait prononcé des mots impardonnables. Si elle n'intervenait pas, il se retrouverait en enfer. EN ENFER !

S'il faut savoir quelque chose de Hope, c'est qu'elle a des oreilles partout. Car oui, en effet, on pourrait croire qu'elle réussit à entendre tout ce qu'elle a besoin de savoir au bon moment. De la chance ? Non. C'est un cadeau de Dieu, selon elle. La chance est quelque chose d'abstrait en quoi croient les infidèles de l'église. La chance, c'est comme un Dieu pour les non-croyants. Ils ne savent pas qui prier, alors ils demandent de la chance. Pauvres âmes perdues ! La jeune fille se doit de consacrer sa vie à les remettre sur le droit chemin.

Ainsi donc, pour en revenir au sujet, Hop-chan avait entendu une jeune fille venue goûter les bols de punch, en désignant un comme étant celui alcoolisé. Surprise, les yeux de l'amie de Dieu passèrent alternativement du verre que tenait le roux au bol de punch alcoolisé. Soudainement, le garçon but son verre d'un train sous les yeux ronds de la croyante.

« DÉMON ! ESCLAVE DU DIABLE ! AHHH ! QUEL USAGE IMPARDONNABLE DU SANG DE DIEU ! »

...Ouais, elle avait crié ça.

A son tour, Darcy écoutait ce que la chimère avait à dire. C’était ainsi que cela se déroulait entre les deux, l’une écoutait l’autre jusqu’au bout avant de répondre. Au moins, on évitait ces dialogues de sourds où chacun s’empresse de couper la parole de l’autre juste pour balancer une réplique cinglante qui, au final, n’abouti à rien puisqu’aucun n’écoute vraiment ce que dit l’autre. Effectivement, la confiance en soit, c’était quelque chose qu’il fallait posséder avec modération. Assez pour se lancer dans les choses que l’on est capable de faire, mais pas trop afin d’éviter de tenter inutilement l’impossible. Au moins, ces deux là auront réussi à se mettre d’accord sur au moins un point. Ce n’est pas grand-chose, mais c’est déjà ça.

Mais venons-en à l’essentiel, à savoir ce que Faith proposait à l’hybride contre son aide. Déjà, elle semblait décidée à mettre son côté un peu tête de mule de côté et accepter l’offre, un effort que Darcy ne manquerait pas de faire peser sur la balance. Ensuite quoi ? La semi-démone qui pourrait retrouver sa liberté ? Comme si Anselm pouvait la retrouver si elle décidait de disparaître. Mais bon, d’un autre côté, c’est plus simple de s’en débarrasser maintenant, et plus facile avec le soutien d’une chimère. Ensuite, il y avait cette dernière remarque…

« Qu'est-ce que tu veux ? J'ai une vie entière à offrir, et elle s'annonce très longue. »

Eh bah, elle n’en demandait pas tant pour dire vrai. Maintenant, c’était clair, Faith n’avait plus aucune estime d’elle-même, à moins qu’elle ne soit vraiment motivée à faire souffrir son futur ex petit ami. Difficile de trancher lorsqu’on se retient de lire les pensées d’autrui. De toute façon, avec le monde qu’il y avait dans la pièce, ce n’est pas comme si Darcy allait parvenir à distinguer quoi que ce soit, pas sans toucher Faith en tout cas. Et un tel contact, l’hybride n’avait pas l’intention de le provoquer, préférant garder un minimum de distance entre elle et les crocs de la chimère. La jeune fille resta donc songeuse devant un tel état d’esprit, ne sachant pas réellement quoi en penser. Finalement, elle lança sa réponse.

« Pour être honnête, l’esclavage ne m’intéresse plus depuis trois bon siècles au moins je dirais. Ta vie, je n’en veux pas, c’est encore à toi de décider ce que tu vas en faire. En revanche… »

Bah oui quoi, vous n’imaginez tout de même pas qu’elle allait faire cela gratuitement non plus. Quoi qu’à côté de ce que lui avait proposé Faith, ce qu’exigeait Darcy n’était pas grand-chose.

« Outre ma liberté retrouvée et le plaisir de me défouler un peu sur l’autre, j’apprécierai quelques infos de ta part. Vois-tu, je ne suis réellement confronté au monde magique que depuis peu. Et même si je me renseigne de façon intense, la théorie et les bouquins n’expliquent pas tout, sans compter le temps que ça prend de faire des recherches à la bibliothèque…. »

L’hybride se sépara de la rampe d’escalier avant de s’asseoir sur les marches pour ensuite croiser les jambes. Visiblement, elle n’avait guère envie de regarder Faith de haut alors qu’elle faisait cette demande, chose que Darcy considérait comme admettre une lacune de sa part.

« Ce que je te propose en échange de mon aide, ce sont donc des renseignements. De temps en temps, il se peut que je vienne te poser deux ou trois questions sur un sujet. Si tu t’y connais dans le domaine sur lequel je t’interroge, tant mieux, sinon tant pis et je cherche ailleurs. Je te serai également reconnaissante de ne plus essayer de m’agresser à l’avenir, quelle qu’en soit la raison. Après ça ? Rien, tu vis ta vie comme bon te semble. Je ne t’oblige même pas à m’éviter ou m’apprécier, ni même m’estimer. Tu as le droit de faire comme si tu ne me connaissait pas en public si ça t’arrange, tu peux même venir me demander des infos ou des services si tu estimes que je peux t’être utile, et que ta demande ne soit pas trop gonflée. Tout ce que je demande, c’est uniquement des infos et de ne plus figurer parmi le gibier que tu chasses. Qu’en dis-tu ? »

Voilà, c’était dit. Pas trop la mer à boire visiblement, en tout cas cela semblait être une proposition bien plus avantageuse que de finir esclave de la semi-démone. Pourtant, elle aurait été en droit d’exiger une telle chose. Pourquoi ne pas l’avoir fait ? Simplement parce que Darcy ne souhaitait pas non plus ressembler à Anselm. « Obéis-moi où j’en fini avec toi », il n’y avait que les créatures désespérées et incapable de se débrouiller seules pour imposer de tels choix à quelqu’un. L’hybride avait donc fait sa proposition sans grande cérémonie. Pas de contrat écrit, pas de menace ou presque, pas de poignée de main ni de conventions superflues. Tout ce que la semi-démone attendait, c’était une réponse, ni plus ni moins. De toute façon, elle se doutait bien que Faith ne s’embarrasserait pas à lui coller un vent si elle avait tendu la main pour qu’elle la serre. En tout cas, le contact humain n’avait pas l’air d’être une chose à laquelle la chimère tenait vraiment, et ce n’était pas pour déranger Darcy, elle-même n’en étant pas grande adepte non plus.

« Oh, juste une chose à éclaircir avant que tu répondes, ajouta soudain la jeune fille, je ne te déteste pas, sinon je ne t’aurais jamais dit la vérité et aurait laissé Anselm faire. La haine ne semble plus faire partie des sentiments que je suis capable de ressentir de toute façon. »

Elle avait prononcé cette dernière phrase avec un bête haussement d’épaule, comme si elle avait parlé d’une chose tout à fait banale et peu surprenante. Pourtant, aux yeux de certains, la mort progressive du cœur d’une personne, qui semble donc perdre les sentiments les plus intenses qui soient, ça doit être quelque chose….

« DÉMON ! ESCLAVE DU DIABLE ! AHHH ! QUEL USAGE IMPARDONNABLE DU SANG DE DIEU ! »

Wooooow, cette fille est dérangée et pas rien qu'un peu ! Heureusement qu'elle n'est pas timide, parce que pour gueuler ça en plein bal, dans un endroit où il y a tant de personnes, il faut bien du courage. C'était exactement ce que se disait Kiara, qui ne pouvait pas s'empêcher de dévisager complètement Hope, levant un sourcil, et tenant son verre vide près de son visage. Ook, comme ça, en plus de pas avoir le droit de dire un simple « Kisama », il n'avait pas le droit de boire ? C'était ... Inimaginable. Il ne pouvait même pas imaginer dans quel enfer serait sa vie si cette jeune fille venait à venir vivre dans la même chambre que lui. Joie, bonheur et belles tulipes de printemps, la chambre est complète, il n'y a pas de place pour l'ami de Dieu. D'ailleurs ... Dieu ? Haha, tant de ridicule lui donnait presque envie de rire.

Et puis ... Esclave du diable ? Démon ? Lui ? Erk, qu'elle honte ! Comment osait-elle le souiller de tels propos ? Il est quand même bien supérieur à ces créatures sans cervelles qui osent venir pourrir la Terre ! À ce qu'il sache, eux, créatures à peu près humaines, ne viennent pas les énerver, alors pourquoi ils viennent ? Il trouvait ça tout simplement ridicule. Ils pourraient rester cacher pour une fois, ça leur ferait de très belles vacances. En plus de ça, une bonne partie de cette « race » semblait être née en enfers ... Pourquoi n'y restaient-ils pas ? Ils y sont sûrement bien mieux vus qu'à la surface ... Mais en plus d'être sales et d'oser souiller les terres "humaines", ces ordures osent se vanter d'être plus fort que d'autres ... Tsk.

- Ssh ... Et si tu allais ennuyer quelqu'un d'autre ?

Oui, il avait eu sa dose. Maintenant, il en avait marre, et rêvait juste que cette « petite » aille voir quelqu'un d'autre que lui. Non mais les gens vulgaires en ce monde, c'est pas ça qui manque ... Bon, vulgaire, violent et alcooliques, y'en a légèrement moins, mais bon ... Elle doit bien pouvoir aller voir quelqu'un d'autre non ?

Eh bien. C'est à toute une proposition qu'elle a droit, la petite Faith. Rien de bien méchant... Pourtant elle l'aurait bien mérité. Elle se serait moins sentie bête d'avoir essayer de la manger plus tôt. Faut croire qu'il y a des gens un peu trop généreux en ce monde envers des gens qui ne le méritent pas. M'enfin. Qu'allait faire la chimère ? Après tout, qui sait quand Anselm allait réellement la laisser tomber ? Rien qu'y penser, ça lui donner envie d'éclater en sanglots. Elle n'y peut rien, elle l'aime, et même si Darcy vient de lui avouer qu'il ne l'aime pas du tout, c'est dans ses bras qu'elle voudrait être. La vie est cruelle. La lézarde se demandait même si elle s'en sortirait. Anselm, il est loin d'être un ange. Normal, puisqu'il est un démon. Ça risquait d'être douloureux... Très douloureux. Ça lui prendrait du temps avant même d'oser lui faire face après ça. La brunette espère seulement que Darcy ne changera pas d'idée entre temps. Elle non plus d'ailleurs. Déjà qu'elle n'avait même pas été capable de lever la main sur lui lorsque « Darek » avait prit son apparence dans la forêt... Tssk. Qu'est-ce qu'elle allait bien pouvoir faire ? Rien que d'y penser et une douleur insupportable lui vrillait le coeur.

...Ah ? Tiens ? Darcy venait-elle d'avouer délibérement qu'elle avait vécue beaucoup plus longtemps qu'elle en a l'air ? Pas étonnant, alors, qu'elle ne la haïsse pas.

« ... Même si mon avis ne t'intéresse probablement pas, je crois que lorsqu'on vit si longtemps, les sentiments on peut-être les même effets qu'une drogue, dit-elle en secouant lentement la tête, trouvant visiblement que ce qu'elle disait était n'importe quoi. Ils nous en faut sûrement de plus en plus pour ressentir les même choses qu'avant. »

Fai se laissa donc glisser d'une marche vers le bas, n'aimant visiblement pas être au même niveau qu'elle. Probablement juste parce qu'au fond, elle se sent inférieure à elle en tout point, hm. Après tout, le démon en a bien fait son bras droit. Ouais, ça peut paraître bizarre, mais elle est jalouse intérieurement. Jalouse de quoi, hein ? Surtout de l'intérêt qu'il lui porte, faut bien l'avouer. La petite baissa donc tristement la tête, évitant de ses yeux bouffis le couple heureux un peu plus loin dans la pièce. Son visage était encore caché par d'innombrables mèches de cheveux. Bof, hein, si elle tentait de cacher le fait qu'elle a envie de pleurer, c'était raté. Elle posa délicatement ses mains tremblotantes sur ses cuisses, caressant le tissus blanc satiné du bout de l'index.

« J'accepterais bien l'offre sans poser de questions, mais... Est-ce que c'est vraiment ce que tu veux ? Après tout, tu pourrais facilement t'en aller sans t'en mêler, si l'envie t'en prenais. Et puis, Anselm peut bien te fournir au moins trente fois plus d'informations sur le monde magique que moi... Sauf que, quoi, va falloir que tu payes le prix à chaque fois avec lui. »

Ses doigts se crispèrent sur ses cuisses, froissant le tissus sous ses petites mains. Ce qu'elle venait de dire lui avait rappeler l'arbre monde. Un beau gros paquets de conneries, maintenant qu'elle y repensait. Elle avait voulu mieux connaître le seul qui s'était intéressé un minimum à elle sans la traiter de monstre depuis le début de sa vie. Il voulait un baiser en échange. Elle l'avait naïvement donné... Et puis elle en avait demandé un autre. Qu'est-ce qu'elle se trouvait stupide, maintenant. Ça ne lui ressemble pas, tout ça. Qu'est-ce qu'il lui était passé par la tête, à ce moment là ? Un grand coup de vent, probablement. Ça avait remué le vide.

« ...Laisse tomber, j'vais accepter et j'vais me la fermer. C'est mieux comme ça. »

...Et voilà, une larme s'était échappée malgré tous les efforts qu'elle faisait pour la retenir. La chimère l'essuya rapidement du revers de la main, mine de rien.

« Ainsi donc, je serais victime d’accoutumance sentimentale, conclu Darcy avec un air songeur, théorie intéressante. »

Théorie qui aurait pu être vraie si l’existence de Darcy n’avait pas été parsemée de certains évènements, comme la mort d’une fille et d’un mari par exemple. Mais cela, il était déplacé d’en parler maintenant. D’une parce qu’il s’agissait de souvenirs que l’hybride aimerait volontiers oublier, de deux parce qu’elle n’aimait parler de son passé qu’aux personnes dont elle se sentait proche, c'est-à-dire personne. La vérité, c’est que Darcy s’était efforcée de rejeter les sentiments de son esprit des siècles durant. Et même s’il lui arrivait encore d’en ressentir, elle était tout de même parvenue à se débarrasser de ceux qu’elle considérait comme les plus gênants, comme l’amour par exemple. Oui, avec le temps l’hybride était devenue incapable d’aimer, et ce n’était pas pour lui déplaire. Lorsque l’on vit bien plus longtemps que les autres, on est souvent confronté à la dure réalité de voir les autres mourir, et il est préférable dans ces cas là de ne pas s’être attaché à eux.

« Quant à mon choix, ajouta-t-elle, pour faire simple, disons que je le trouve susceptible d’être plus divertissant ainsi. »

Eh oui, Darcy s’amusait de la situation. Non pas qu’elle se moquait de Faith, ou même d’Anselm, loin de là. En réalité, elle aimait juste le changement, les rebondissements. Combat, victoire, vengeance, défaite, engagement forcé, trahison… Tout cela était comme un jeu pour la semi-démone. Un jeu dangereux au vu des autres joueurs et de la situation, certes. Mais que voulez-vous, en plusieurs siècles, on a le temps de s’ennuyer, alors on s’amuse comme on peut.
Ces pensées en tête, Darcy esquissa un sourire. Pas son habituel sourire en coin aux lèvres soudées entre elles. Non, cette fois-ci, elle avait laissé entrevoir ses dents, une partie de celles du haut tout du moins. Venant d’une personne qui cherche à tout prix à éloigner les gens, car peu sociable, et qui passe son temps à éviter l’uniforme de Mahora comme s’il avait été porté par un lépreux, on aurait été en droit de s’attendre à une dentition peu soignée et pas très avenante. Mais c’était tout le contraire chez la semi-démone. Une dentition parfaitement blanche et régulière, à tel point qu’un dentiste pourrait en être jaloux. Pourquoi un tel choix ? Par souci de confort vous répondrait-elle, des dents lisses et parfaitement alignées, c’est toujours plus agréable. Cependant, il était tout de même bien dommage qu’un si joli sourire appartienne à une personne qui ne le montre presque jamais…

M’enfin, cessons de nous égarer sur les dents de mon personnage, car elles n’ont strictement aucun intérêt dans cette affaire. De plus, elles sont déjà de nouveau cachées par les lèvres closes de Darcy, alors autant les oublier et revenir aux raisons qui la poussent à aider Faith plutôt qu’Anselm. Outre le côté divertissant de la chose, il y avait également les circonstances. Oui, l’hybride pourrait disparaître sans laisser la moindre trace, elle en avait l’habitude. Cependant, fuir Anselm, c’était fuir Mahora, et cela, elle ne pouvait pas se le permettre. Cet endroit était le seul à sa connaissance à être mêlé au monde magique, et il était donc hors de question pour Darcy de perdre le seul lien qu’elle avait avec cet univers.

« Et crois-moi, j’y trouve mon compte bien plus que tu ne l’imagine à t’aider, même si tu ne le réalises peut-être pas. »

En attendant, si t’avais été plus claire, elle aurait pu comprendre sans problème…

Un vague haussement d'épaules. C'est tout ce que Faith se contenta de faire face aux répliques de Darcy. Ce n'était pas qu'elle se foutait de ce qu'elle dit, mais bon ... Si toute cette histoire l'amuse, tant mieux pour elle. Mais la chimère, elle, elle ne trouvait ça pas drôle du tout. Elle avait du mal à contenir ses larmes, à s'empêcher de trembler. Et ELLE, elle trouvait ça DIVERTISSANT ? Dire qu'il y a quelques minutes à peine, cette fille remontait lentement dans son estime ... Bah, pour être honnête, elle venait de refaire une sacrée rechute. Elle aurait peut-être du garder cette remarque pour elle, hein. Un peu plus et elle gagnait pratiquement la « confiance » de la petite. Faut dire que naïve comme Fai est, c'est pas bien difficile de l'avoir de son côté. M'enfin, si on la blesse, c'est une tout autre chose. Déjà que Darek l'avait carrément traumatisée, si la créature n'avait pas surmonté ses propres peurs, elle n'aurait jamais su ce que Anselm lui réservait. Peut-être qu'elle n'aurait carrément pas du le savoir. Il l'aurait abandonnée comme prévu. Fin de l'histoire. Mais non, avec cette nouvelle, Darcy avait réussis à toucher les cordes sensibles de Faith. Elle était à portée de mains. Mais la voilà déjà repartie. Frivole comme un papillon. Ou pas. Juste très facile à blesser, presque aussi facile à convaincre. Pas assez rancunière. Sauf que, juste de savoir que Anselm ne l'aimait pas, qu'il avait mentit tout ce temps là, ça lui donnait envie de le faire souffrir comme elle souffrait présentement. Du donnant-donnant, qui dirait. Rien de plus, rien de moins. De toute façon, si elle voulait le tuer, elle n'en serait même pas capable. Elle l'aime, elle. Qu'est-ce qu'elle peut bien y faire ? Elle a été naïve. Trop naïve. Comme d'habitude. Quelle idiote elle faisait.

La brunette releva la tête, l'inclinant doucement vers l'arrière, les nombreuses mèches folles s'échappant de son chignon se déposant sur les marches derrière elle. Elle jeta un bref regard à Darcy, ses yeux retournant fixer le plafond après deux ou trois secondes. Tssk, elle avait sourit. Ce que Fai avait eu le temps de voir, c'était un sourire en coin décoré de belles dents blanches, parfaitement alignées ... Des dents normales, quoi. Pas comme les siennes. Non, hein. La chimère, elle, elle avait des crocs. Deux grands crochets de vipère. Décidément, c'est pas pour rien que Anselm aie choisit cette fille au lieu d'elle. Un mince sourire se dessina sur les lèvres closes de la créature, accompagné d'un léger rire.

« J'espère que tu t'amuses bien, hein. »

Woh, ton incroyablement sec, tout d'un coup. Faut pas se demander pourquoi. Cependant, sa voix était toujours aussi basse et tremblotante. Ça fait un drôle de mélange, à vrai dire. La petite éprouvait déjà beaucoup de difficultés à se retrouver en temps normal dans sa tête naturellement très en désordre, et la voilà maintenant qui devait se battre avec une vague de sentiments qui l'envahissait en un seul coup. Amour. Haine. Tristesse. Regrets. Et j'en passe ...

[Hop, un peu court, mais bon.]

Iiiik. Un léger frisson parcourut les frêles épaules de la pauvres fille.Comme si quelque chose de glacial venait de passer , qui l'avait ramener de son pseudo émerveillement , de même que l'état de découragement qu'elle avait face a ce qu'elle avait vu de la part de son « amie » . Pourtant , ce n'était qu'un simple petit « Bonsoir. » qui venait d'être dit par une voix qu'elle avait déjà entendu , une voix familière. Il n'y a pas si longtemps que ça , en fait. Elle n'osa pas tourner la tête tout de suite , prenant une respiration bien profonde pour se calmer , disons . Ça lui avait fait faire un saut , et ça paraissait plus ou moin à cause de ça. Elle tourna ensuite la tête a moitié de façon brusque , faisant en sorte que plusieurs mèches de cheveux qui recouvraient son oeil se retrouve de l'autre coté de son visage , cachant son l'autre.Elle ne prit pas la peine de tasser ces vilaines mèches et regarda son interlocuteur du coin de l'œil , vérifier si c'était bien qui elle croyait que c'était. [ Wouh , la méchante phrase toi !] Après un bref regarde , elle eu sa confirmation ; C'était Yuki. Son Cavalier, la personne qui avait accepter de l'accompagner à ce bal. Ou plutôt , la personne qui avait accepter de l'endurer , ouais. C'est plus approprié. Elle lui en était bien reconnaissante , la jeune fille . Il n'avait pas l'air plus à l'aise qu'elle ne l'était , en plus . La pauvre petite créature devait maintenant répondre, hein ? Pour faire des salutations digne de ce nom , elle se décida enfin a se tourner au complet , doucement , se retrouvant face à face avec lui. « Bonsoir. » , lui répondit-elle sur un ton plutôt ... Rêveuse ? En essayant en même temps de se dessiner un sourire sur le coin de ses lèvres. C'est l'ambiance qui la rendait comme ça .Ça la rendait ... Joyeuse , si l'ont peut dire ça. Par contre , elle détourna le regard très rapidement pour le diriger en direction de la salle . Gênée ? Peut être , oui.  « Tu ... veux que l'ont rentre ? » Tout en regardant d'autre élèves passer par petit troupeau dans la salle , un à la suite des autres.